REGLES DES FILLES DE LA SAGESSE
[ou de la Providence]
LA FIN DE LEUR INSTITUT
1. 1. La fin intérieure des
Filles de la Sagesse est
l'acquisition de la divine Sagesse.
La fin extérieure est
triple selon leurs talents, savoir:
1 l'instruction des
enfants des villes et des campagnes,
dans les écoles
charitables; 2 le bon gouvernement
des pauvres dans les
hôpitaux ou hors des hôpitaux,
soit qu'ils soient malades ou
non, soit qu'ils soient incurables
ou non; 3 comme aussi la
direction des maisons de retraite
où on les appelle.
2. 2. Comme chacun a son talent différent,
les Supérieurs
les appliqueront selon leurs talents
aux emplois où Dieu les
appelle, après leur année
de noviciat; et même après plusieurs
années, si la première
ne suffit pas.
Conseils
3. Mes chères filles, prenez
garde aux tentations du malin
[esprit] à l'égard
de la fin que vous devez vous proposer en
vous unissant dans la même
maison.
4. 1.- Ne prenez pas pour fin principale
votre repos, ni
l'exercice da la charité
envers le prochain. Vous n'y devez
pas prendre votre repos naturel,
ni même intérieur, selon les
lois de la nature, parce que souvent
l'obéissance, qui vous
ordonnera des choses extérieures
et contraires à votre
attrait, renverserait le projet
que vous vous êtes formé. Vous
ne devez pas non plus prendre la
charité pour le prochain,
pour votre fin principale; car si
dans la suite, vous n'étiez
point occupées au service
du prochain, vous tomberiez dans le
trouble, le chagrin et le découragement;
mais si votre
première intention est de
vous sanctifier, en accomplissant la
volonté de Dieu marquée
par l'obéissance, vous resterez en
paix, de quelque manière
que les choses arrivent.
5. 2.- Comme Notre-Seigneur nous
ordonne de ne point penser
au lendemain, non seulement à
l'égard du corporel, mais
surtout à l'égard
du spirituel, ne pensez point volontairement
à ce qui peut vous arriver
dans la suite, à l'égard du genre
de vie que vous avez embrassé;
regardez ces pensées de futur
contingent et conditionnel, comme
de fines tentations du démon
qui par là veut vous faire
perdre courage, en vous
représentant un gros tas
d'années à passer dans le silence, la
pénitence, l'obéissance
et la pauvreté. Il veut vous faire
perdre la paix, ou du moins le temps,
en vous repaissant de
chimères, qui ne sont pas
encore et ne seront peut-être
jamais. Ces futurs conditionnels
sont, par exemple, si mon
père et ma mère viennent
à mourir, que ferai-je? Si cette
personne, ce supérieur, ce
directeur manque, que deviendra
cette maison?
6. 3.- Soyez persuadées que
le démon ne cessera de vous
tenter de mille manières,
pour vous faire changer de
résolution et de fin dans
vos exercices, soit devant, soit
après votre profession; il
vous grossira et augmentera vos
difficultés, vos craintes,
vos répugnances, etc., il remuera
vos humeurs, il obscurcira votre
esprit; enfin il fera jouer
tous ses ressorts diaboliques pour
vous faire prendre
l'échange! Mais vous serez
victorieuses et bienheureuses si
vous découvrez vos peines
à votre Directeur et à votre
Supérieure, si vous leur
obéissez aveuglément.
L'ENTREE AU NOVICIAT
7. 1. On ne reçoit, parmi
les Filles de la Sagesse, que des
filles sages ou des veuves véritables,
depuis seize ans
jusqu'à quarante. Les personnes
trop âgées ou trop infirmes en
sont exclues.
8. 2. On y reçoit les pauvres
comme les riches, pourvu que
leurs dispositions et leur vocation
soient bonnes, c'est-à-
dire, si elles sont dociles et pauvres
d'esprit.
9. 3. On n'exige d'elles aucune somme
d'argent ni aucune
pension; mais, si elles apportent
quelque argent il est reçu
comme une aumône, qui est
mise dans la bourse commune et qui
sert à l'entretien de toute
la communauté.
10. 4. On y reçoit très
rarement des pensionnaires, c'est-à-
dire des filles ou femmes, qui ne
soient pas dans la
résolution d'y faire profession;
mais, quand on en reçoit, en
quelques cas extraordinaires, en
faveur de quelque personne
d'un grand mérite, on ne
stipule point pour sa pension et on
l'oblige à faire toutes les
règles communes, sans exception;
autrement elle dérangerait
toute la communauté.
11. 5. Les novices et les pensionnaires
ne sortent jamais
dehors de la maison que par une
permission extraordinaire de
la Supérieure et dans une
pressante nécessité. Si, dans la
communauté, il n'y a point
de chapelle bâtie, elles sortent
pour entendre la sainte Messe et
recevoir les sacrements; mais
elles ne se chargent ni ne s'embarrassent
point des affaires
temporelles, et, si elles en ont
avant que d'entrer au
noviciat ou à la pension,
on ne les y reçoit point qu'elles ne
soient terminées. Si, après
leur entrée, il leur en survient,
elles ne s'en mêlent point
par elles-mêmes, mais une personne
séculière, qui fait
les affaires dehors, en prend soin.
12. 6. Le premier noviciat dure au
moins un an après avoir
pris l'habit, et plus longtemps,
si on le juge à propos, selon
les dispositions du novice; et,
pendant ce noviciat, on exerce
les novices en toutes sortes de
vertus, pour les dépouiller de
leurs mauvaises habitudes, de leurs
inclinations vicieuses, de
leurs humeurs naturelles et de leurs
moindres imperfections
et, à cet effet, la Maîtresse
des novices leur fait pratiquer
l'obéissance, le silence,
la modestie, la mortification,
l'oraison, le mépris du monde
et de soi-même.
13. 7. Le second noviciat dure au
moins un an et, pendant ce
noviciat, outre les exercices de
piété communs à la
communauté, elles s'appliquent
à apprendre parfaitement la
manière de faire le catéchisme,
et de tenir les petites
écoles, l'écriture,
la lecture et des ouvrages manuels, selon
leur capacité.
Conseils
14. - Gardez-vous des tentations
différentes que le malin
esprit livre ordinairement aux Novices;
car n'ayant pu
empêcher l'entrée au
Noviciat, par les parents charnels, par
les amis intéressés,
par des craintes frivoles, par des
respects mondains et par mille fausses
raisons qu'il apporte
pour empêcher cette entrée
au Noviciat, il tâche d'en empêcher
l'effet qui est la sanctification
de la personne;
1) en lui représentant ce
qu'elle a quitté dans le monde;
2) en lui faisant mépriser
les petites règles et les
petites pratiques de dévotion
établies dans la communauté;
3) en la jetant dans des ennuis
et des troubles;
4) en lui représentant qu'elle
doit être plus considérée
qu'une autre, soit à cause
de sa qualité, soit à cause du bien
qu'elle donne, soit à cause
de quelque talent d'esprit ou de
corps;
5) en lui inspirant de la froideur
contre les autres et
même contre les Supérieurs,
lui faisant accroire qu'ils ont
quelque chose contre elle;
6) soit en lui donnant de l'éloignement
des sacrements
sous les plus beaux prétextes
du monde. Il y a une infinité
d'autres pièges que le démon,
de concert avec le monde, tend
aux Novices, ou pour les faire sortir,
ou pour les engager
dans le péché, ou
pour retarder leur perfection. L'ouverture
de coeur et l'obéissancee
aveugle sont des remèdes
infaillibles, et des armes toutes
puissantes dans ces peines
et ces combats.
LEUR PROFESSION ET LEURS VOEUX
15. 1. L'année de leur premier
noviciat expirée ou plus tard,
si la novice est disposée,
elle fait profession, en faisant
les trois voeux simples d'obéissance,
de pauvreté et de
chasteté, pour un an, en
secret et en particulier, sans aucune
cérémonie extérieure,
après dix jours de retraite et de
silence, sans parler à personne
qu'à la Supérieure et au
Directeur.
16. 2. Elle renouvelle ses voeux,
tous les ans, si elle
persévère de coeur
et d'affection dans sa vocation; mais, si
elle n'y persévère
pas, l'année de ses voeux expirée, elle
peut sortir sans aucun empêchement.
17. 3. De même, si la Supérieure,
de concert avec la
communauté, n'est pas contente
d'une des professes, à raison
d'une faute griève et réitérée,
elle peut la mettre dehors.
18. 4. Si la professe a donné
quelque argent ou meubles, en
aumône, à la communauté,
en y entrant, si elle vient à sortir
de sa propre tête, au bout
de l'année, ou par une faute de
désobéissance formelle,
on ne lui rend rien de ce qu'elle a
apporté; mais, si la communauté,
au bout de l'an, la met
dehors pour de bonnes raisons, elle
lui rend ce qu'elle y a
apporté, ses dépenses
déduites.
19. 5. Si cependant la défaillante
avait donné tout son bien
à la communauté, la
communauté doit le lui rendre, ses
pensions déduites.
20. 6. Pendant cinq années
consécutives après leur
profession, elles renouvellent leurs
trois voeux pour un an;
et, si elle se trouvent, de concert
avec la communauté, bien
appelées, elles font, au
bout de cinq ans, les trois voeux
pour toujours.
Conseils
21. 1.- Quand vous aurez la pensée
de sortir de la Communauté
après votre profession, découvrez-la
aussitôt à votre
Directeur ou à la Mère
Supérieure, et attendez un temps
considérable pour savoir
si c'est effectivement une tentation.
22. 2.- Prenez garde de donner occasion
à ces tentations, en
fréquentant les gens du monde
ou les dévotes à la mode, ou en
prenant conseil d'un autre que de
votre Directeur ou de votre
Supérieure.
23. 3.- Renouvelez, tous les premiers
samedis du mois, vos
voeux à Dieu, entre les mains
de la Sainte Vierge, dans une
Communion que vous ferez à
cette intention.
LEUR PAUVRETE
24. 1. Elles n'ont rien en propre,
pas même un denier, pas
même un habit, pas même
une paire d'heures, pas même un meuble
de chambre ou de dévotion;
tout est en commun et la communauté
est obligée, après
leur profession, de leur fournir de tout ce
qui leur est nécessaire pour
la nourriture, l'entretien et le
vêtement.
25. 2. A la vérité,
elles n'abandonnent pas, si elles ne
veulent, les revenus et même
le domaine de leurs biens de
patrimoine, si elles en ont; mais
l'usufruit et l'emplette de
ces biens est dans l'entière
disposition de leurs Supérieurs
dans la communauté, les employant,
comme bon leur semble, aux
besoins de toute ladite communauté,
sans distinction du riche
et du pauvre.
26. 3. Comme pauvres, elles sont
habillées de l'habit des
pauvres des hôpitaux et des
campagnes, qui est le gris, à peu
près comme les filles de
la congrégation de M. Vincent, si non
que, pour une plus grande modestie,
elles ont une cape noire
par-dessus qui les couvre et les
ensevelit, depuis la tête
jusqu'aux pieds.
27. 4. Elles ont chacune leur pauvre
petite cellule, dans
laquelle il n'y a: 1 qu'un lit de
planches avec une paillasse
et un matelas et des rideaux; 2
une table; 3 une chaise; 4
un crucifix; 5 une image de la Sainte-Vierge;
6 un coffre
sans serrure; 7 un porte-manteau,
des époussettes, un
chandelier et un balai; tout le
reste, comme inutile et
superflu, en est banni.
28. 5. Elles font des ouvrages manuels;
mais elles ne les
vont pas chercher ni demander hors
de la maison; elles n'en
font point le prix et elles n'en
perçoivent point le paiement
par leurs mains propres et elles
n'en profitent d'aucune chose
plus que la communauté; tout
le fruit, qui en revient, est mis
en commun par l'Econome ou la Supérieure.
29. 6. Dans leurs besoins corporels,
elles ne demandent
jamais l'aumône à personne;
soit à des parents, soit à des
étrangers, soit pour la communauté
en général, soit pour leurs
besoins en particulier, soit directement,
soit indirectement;
mais elles s'abandonnent, pour toutes
choses, aux soins de la
divine Providence, qui les aidera
de la manière et dans le
temps qu'elle voudra, comme si elles
attendaient,
immédiatement d'un ange envoyé
du ciel, la nourriture et
l'entretien; et cependant elles
travaillent à des ouvrages
manuels, pour gagner quelque chose,
comme si elles
n'attendaient rien de Dieu.
30. 7. Quand, selon leurs talents,
on les envoie faire le
catéchisme et tenir les écoles
en quelque ville ou campagne,
elles ne regardent la pension modique,
qu'on leur donne pour
un an, que comme le salaire de leurs
travaux et de leurs
peines pendant ladite année;
en sorte que, si, par négligence,
elles ne remplissent pas leurs devoirs,
elles commettent une
grande injustice, en se servant
d'un bien qu'elles
n'acquièrent par aucun titre.
Comme on ne leur donne de
pension que ce qui est absolument
nécessaire pour vivre, elles
ne font aucune dépense inutile
et, si à la fin de l'an, elles
ont épargné quelque
chose, elles n'en peuvent disposer sans
une permission expresse, ni à
leurs parents, ni à leurs amis.
31. 8. Elles ne demandent rien, directement
ni indirectement,
aux enfants qu'elles instruisent;
mais si quelque parent d'un
enfant riche veut, par pure reconnaissance,
sans qu'on le lui
ait demandé, leur faire quelque
aumône, elles ne la reçoivent
jamais par leurs mains propres;
mais, si elles font l'école
dans la ville où est la Mère-Communauté
ou le noviciat, elles
supplient leurs bienfaiteurs de
donner leur charité à leurs
Supérieures et, si elles
font l'école dans quelque autre ville
ou dans la campagne, elles reçoivent
elles-mêmes ladite
charité.
32. 9. Si Dieu les appelle à
gouverner quelqu'hôpital, elles
n'ont qu'un entretien pauvre et
modique, se contentant du pain
des pauvres, si elles n'en ont pas
d'autre, et, pour la
pension et les aumônes, elles
en agissent, comme les
maîtresses d'école,
faisant toutes choses par pure charité.
33. 10. La Supérieure les
fait changer, tous les ans, de
chambre, de meubles et même
d'habits, quand elle y remarque de
l'attache, et, deux fois par an,
on leur coupe les cheveux.
Conseils
34. 1.- Prenez garde de posséder
quelque chose en particulier
sans une vraie nécessité
et une parfaite obéissance. Le démon
ne manque pas d'inspirer, tous les
jours, aux religieux et
religieuses, mille beaux prétextes
et mille raisons
apparentes, pour leur faire transgresser
leur vertu de
pauvreté, ou du moins pour
en diminuer le mérite.
35. 2.- Prenez donc garde d'avoir
attache à la moindre
chose; quand vous y sentirez beaucoup
d'affection, quittez-la
pour un temps ou vous en privez
tout-à-fait.
36 3.- Le malin esprit vous tentera,
sous ombre de piété,
d'avoir, dans vos chambres, plusieurs
images et meubles de
dévotion, pour vous et pour
les autres. De cent religieuses, à
peine une s'exempte-t-elle de tomber
dans cette fine
tentation.
37. 4.- Regardez d'un autre côté,
comme une fine tentation,
de ne pas découvrir vos besoins
temporels à votre Supérieure,
crainte d'un refus ou par humeur.
38. 5.- Ne pensez point au lendemain,
de propos délibéré et
sans une vraie nécessité.
Dieu vous le défend, et le démon
l'inspire pour troubler ou pour
faire perdre le temps.
39. 6.- Si vous voyez quelqu'une
de vos Soeurs mieux habillée
et mieux entretenue que vous, prenez
garde à la tentation de
jalousie et de murmure; le malin
esprit ne manquera pas de
vous grossir les commodités
qu'ont les autres et que vous
n'avez pas, afin de vous troubler
et diviser intérieurement
d'avec elles; pour cet effet, il
vous représentera que vous
avez plus apporté à
la Communauté que telle ou telle, que vous
êtes quelque chose de plus,
que vous travaillez mieux, etc.;
il vous représentera vos
anciennes commodités, lorsque vous
jouisiez de votre bien en particulier,
et du fruit de vos
travaux, et il vous donnera l'envie
de retourner dans le
monde.
40. 7.- Par esprit de pauvreté
et d'humilité, je vous
conseille de choisir le pire en
tout, autant que vous pourrez,
la nourriture la moins délicate,
les habits les plus vieux et
les plus grossiers, les emplois
les plus bas, etc.
41. 8.- Aimez à manquer de
quelque chose dont les autres ne
se passent pas, et n'en témoignez,
au dehors, aucune peine.
42. 9.- Ne parlez jamais avec estime
des biens du monde. Ne
dites jamais: si on me donnait telle
somme d'argent, si
quelque personne riche nous donnait,
etc., nous bâtirions,
nous achèterions, etc. Tous
ces désirs sont dans les païens et
les mondains et indignes des véritables
sages, qui, non
seulement ne désirent aucun
bien temporel, même pour des
oeuvres pieuses, mais encore, quittent
tout ce qu'ils
possèdent le plus légitimement,
pour suivre de plus près la
Sagesse incarnée.
43. 10.- Prenez bien garde de raconter
aux autres les
commodités que vous aviez
dans le monde, les biens que vous
avez apportés à la
Maison; ne parlez jamais de votre habileté
ou savoir-faire en plusieurs ouvrages.
44. 11.- Ne faites aucun cas de tout
l'extérieur et visible
en soi-même, quelque grand
et relevé qu'il paraisse selon la
nature et estimez beaucoup, parmi
vos Soeurs, celles qui sont
les plus pauvres et les moins capables
au dehors.
45. 12.- Quand vous avez besoin de
quelque chose, pour votre
santé ou pour votre entretien,
avant de le demander à votre
Supérieure, faites un quart
d'heure au moins d'oraison devant
Dieu, pour voir en sa lunmière
si, véritablement, selon la
perfection, vous avez un tel besoin;
ensuite, si votre pensée
du coeur est la même, demandez
hardiment et simplement; et si
vous êtes refusée ou
rebutée en vos demandes, tenez-vous en
paix, comme si Jésus-Christ
en personne vous l'avait refusée.
LEUR OBEISSANCE
46. 1. La pratique parfaite de la
sainte obéisssance est la
vertu spéciale qui distingue
les Filles de la Sagesse. Comme
la divine Sagesse, qui commandait
dans les cieux, est venue
sur la terre pour obéir,
depuis le premier instant de son
incarnation jusqu'à sa mort;
de même, ses filles ont quitté le
monde, pour, à l'exemple
de la Sagesse, captiver leur
entendement et leur volonté
sous le joug de l'obéissance.
47. 2. Elles obéissent à
leurs Règles et à leurs Supérieurs
premiers et subalternes:
1 Entièrement, sans partage;
2 Promptement, sans délai;
3 Joyeusement, sans chagrin;
4 Saintement, sans respect humain;
5 Aveuglément, sans raisonnement;
6 Et persévéramment,
sans discontinuation.
Ces six qualités de l'obéissance
méritent une longue
explication.
48. 3. Elles doivent être fidèles
à toutes leurs Règles, même
les plus petites; et, lorsque leur
Règle ne leur prescrit
point une chose, elle doivent en
demander la permission, quand
elles la veulent faire, afin que
l'obéissance chasse le poison
de leurs actions, qui est leur propre
volonté.
49. 4. Elles doivent obéir
à leur Supérieure en toutes les
choses qui ne sont point prescrites
par la Règle et, même
quand elles le seraient, si les
occasions ou les circonstances
rendent la pratique de la Règle
impossible ou bien difficile,
elles en doivent demander l'interprétation
ou l'exemption à
leur Supérieure.
50. 5. Elles peuvent, et doivent
même souvent, représenter
leurs raisons pour faire ou ne pas
faire quelque chose; mais
avec indifférence et sans
passion, ne se formalisant jamais
d'un refus d'une chose qui leur
paraît la plus juste.
51. 6. Elles tâchent d'obéir
à toutes créatures pour l'amour
de Dieu, quand la chose commandée
n'est pas contre d'autre
volonté que la leur.
52. 7. Elles demandent toutes leurs
permissions à leur
Supérieure à genoux
et avec humilité, parce qu'elles ne
regardent que Jésus-Christ
en elle; lesquelles permissions
elles ne demanderont à genoux,
que lorqu'il n'y aura aucun
étranger présent.
53. 8. Elles ne manquent pas de réparer
publiquement les
fautes qu'elles ont faites en public
contre la sainte
obéissance.
54. 9. Pour le gouvernement de la
communauté, elles obéissent
à Monseigneur l'Evêque
et à celui qui leur est commis de sa
part, aux Pasteurs de la paroisse
où elles sont et, quand
elles sont dans les hôpitaux,
elles obéissent aux Aumôniers,
pour le gouvernement intérieur
des pauvres, et aux
Administrateurs, pour le gouvernement
extérieur de l'hôpital.
Conseils
55. - Comme le démon est orgueilleux
et désobéissant, il vous
livrera, chères Filles, de
grandes et de fines tentations
contre la sainte obéissance,
afin de vous en séparer, soit à
l'égard de vos Règles,
soit à l'égard de votre Supérieure,
soit à l'égard de
votre Directeur.
56. 1.- Prenez bien garde de faire
peu de cas des petites
règles et petites pratiques
de piété, et de les transgresser
sans beaucoup de scrupule; car celui
qui méprise les petites
choses tombera peu à peu.
57. 2.- Le malin esprit, pour vous
empêcher d'obéir à votre
Supérieure, vous mettra dans
l'esprit:
1) qu'elle ne vous aime pas, et
même qu'elle vous prend à
la tâche et vous en veut;
2) qu'elle n'est pas capable de
commander;
3) qu'elle affecte la domination
et la supériorité;
4) qu'il n'y a pas de raison dans
ce qu'elle commande;
5) qu'elle ne contredit pas les
autres comme vous;
6) qu'elle est remplie de tel ou
tel défaut, et qu'elle
ne mérite pas qu'on s'arrête
à ce qu'elle dit, et qu'on mette
sa confiance en elle.
58. 3.- Si le démon ne peut
pas vous faire tout-à-fait
désobéir, il vous
fera obéir en retardant longtemps, en vous
plaignant, en grondant, en murmurant,
et avec un air chagrin
et dédaigneux.
59. 4.- Découvrez tout votre
intérieur à votre Directeur, ne
lui cachant rien de ce qui peut
lui faire connaître votre
tempérament, découvrez-lui
vos bonnes et mauvaises
inclinations, vos desseins et vos
entreprises; ne jugez ni en
bien ni en mal de vous-même,
laissez-en le jugement entier à
votre Supérieure et à
votre Directeur.
60. 5.- Regardez comme une fine tentaton
de ne pas consulter
sur une chose très sainte
que vous voulez faire sous prétexte
que votre Directeur n'est pas assez
éclairé en cette matière,
ou que vous n'avez aucun doute sur
la bonté de votre action ou
sur la vérité de la
chose.
61. 6.- Prenez bien garde après
un refus de votre Supérieure
d'aller vous plaindre, à
quelque égale ou inférieure, de son
procédé; prenez bien
garde d'user de finesse et de détour,
pour extorquer quelque permission
des Supérieurs.
62. 7.- Ne craignez point de blesser
l'honnêteté du monde
pour obéir promptement au
moindre point de la règle ou au
moindre commandement de vos Supérieurs;
ainsi, si un exercice
public vous appelle, quittez promptement
la compagnie où vous
êtes, à moins qu'elle
ne fût absolument nécessaire.
63. 8.- Pour vous perfectionner,
en peu de temps, dans la
grande vertu de la Sagesse, qui
est l'obéissance, ne faites
point difficulté de soumettre
votre jugement et votre volonté
à vos égaux et à
vos inférieurs, en des choses indifférentes.
64. 9.- Vous devez remarquer qu'il
vous est tout-à-fait libre
de découvrir votre intérieur
à votre Directeur ou à votre
Supérieure, selon votre attrait.
Cependant, il faut avouer que
celles de la Communauté qui
ont assez d'humilité et
d'obéisssance pour se découvrir
à leur Supérieure, font une
action héroïque, et
avancent plus que les autres dans la
vertu, par cette pratique commune
dans les Communautés
ferventes.
65. 10.- Souvenez-vous de cette admirable
sentence de saint
François de Sales, marquée
dans sa Règle: d'autant plus que
vous préférerez la
communauté à votre particularité, d'autant
plus devez-vous savoir que vous
avez profité.
LEUR CHASTETE
66. 1. Les Filles de la Sagesse font,
à leur profession, un
voeu simple de chasteté,
pour un an, et, tous les ans, si
elles le veulent, elles le renouvellent
avec les autres voeux,
en particulier, comme il a été
dit.
67. 2. Elles n'admettent aucun homme
dans leur chambre ou
cellule, que dans une absolue nécessité,
comme un ouvrier, un
chirurgien, etc.
68. 3. Elles sortent, à la
vérité, dehors de la maison pour
rendre service aux pauvres; mais
elles gardent fidèlement les
règles suivantes: 1 autant
qu'elles peuvent, elles prennent
une compagne pour leur ange gardien;
2 elles marchent
modestement, les yeux baissés,
ne regardant jamais ni à droite
ni à gauche dans les boutiques,
quand elles marchent dans les
rues d'une ville; 3 elles ne regardent
jamais les hommes
fixement en face; mais, quand elles
leur parlent, elles se
tournent un peu de côté;
4 elles se couvrent les mains et le
visage, le plus qu'elles peuvent
avec leur cape; 5 elles ne
demeurent jamais seules avec un
homme, dans une chambre la
porte fermée; quand elles
sont obligées, par charité ou
nécessité de converser
avec quelque homme, soit laïque, soit
ecclésiastique, soit religieux,
que ce soit dans un lieu
ouvert, si cela se peut, ou du moins
que la porte de la
chambre soit ouverte; 6 pour obtenir
de Dieu la conservation
du trésor de la pureté
et la grâce de remplir leur devoir de
charité, elles n'entrent
jamais dans leurs chambres ou dans
celle d'un particulier, qu'elles
ne récitent un Ave Maria, à
genoux ou debout soit avant d'y
entrer, soit après y être
entrées; 7 elles ne reçoivent,
par leurs mains propres, aucun
présent, sans une permission
expresse; 8 elles évitent de
retourner dans les maisons où
on leur aurait dit des paroles
insolentes; et, quand on leur dit
de telles paroles, non
seulement elles se donnent bien
garde d'en rire; mais, en
reprenant modestement ceux qui les
disent ou du moins en
montrant un air triste et sévère,
elle se retirent au plus tôt
du lieu et, si c'est dans une rue,
elles passent leur chemin
sans rien dire, faisant un acte
de contrition dans leur coeur.
69. 4.- Elles se gardent de tout
ce qui peut tant soit peu
ternir le beau lys de la virginité
et dont les filles du monde
ne se donnent pas assez garde, comme
de badiner ensemble, de
se baiser mutuellement, de se toucher
les mains l'une l'autre.
70. 5.- Elles font en sorte qu'on
ne voie jamais aucune
partie de leur corps, soit en se
levant, soit en se couchant,
et elle ne couchent jamais deux
ensemble sans nécessité.
Conseils
71. 1. - Puisque vous voulez, par
le secours d'une grâce
spéciale, conserver à
Jésus-Christ votre virginité ou
chasteté, obtenez cette grâce
par beaucoup de prières, et ayez
une grande dévotion à
la Sainte Vierge, la mère, la reine et
le modèle des véritables
vierges.
72. 2.- Défiez-vous beaucoup
de vous-mêmes, quelque force que
vous ayez et quelque victoire que
vous ayez remportée; c'est
pourquoi, évitez les moindres
occasions du péché contraire à
cette vertu divine, comme si vous
n'aviez jamais remporté de
victoire, et découvrez exactement
vos tentations sur cette
matière.
73. 3.- Résistez fortement
au commencement de la tentation,
car si vous différez trop,
vous succomberez.
74. 4.- Ne donnez jamais à
votre corps tout ce qu'il demande;
retranchez-lui quelquefois, avec
obéissance, les plaisirs
permis; la rose naît parmi
les épines, et la chasteté, parmi
les châtiments et les mortifications.
LEUR SILENCE
75. 1. Elles gardent exactement le
silence, en tout temps,
hormis dans les deux heures de récréation
après les repas, et
toutes les fois que la charité,
l'obéissance et leur emploi
leur ordonnent de le rompre.
76. 2. Quand elles sont obligées
de parler, dans la
communauté ou dans les écoles
ou dans les salles des pauvres,
c'est tout bas et en peu de mots,
gardant par ce moyen le
silence, autant qu'elles peuvent.
77. 3. C'est pourquoi elles évitent
d'appeler, en ces lieux,
une personne de loin ou par la fenêtre;
aimant mieux faire
cent pas pour lui parler que de
faire un grand cri contre le
silence et la modestie.
78. 4. Quand, avec permission, elles
sont à parler avec
quelqu'un qui est venu les visiter,
elles observent les règles
de la modestie dans le parler et
ne sont jamais plus d'une
demi-heure avec lui, sans une permission
spéciale.
79. 5. Elles ne font de visites que
celles que l'obéissance,
ou la charité ou la bienséance
chrétienne leur prescrit et le
plus rarement qu'elles peuvent.
80. 6. Elles ne parlent point, en
présence de leur mère, si
elle ne les interroge ou ne leur
commande de parler.
81. 7. Quand elles ont quelque chose
de nécessaire à se dire
les unes aux autres, quand la chose
peut se différer, elles
attendent le temps de la récréation.
Conseils
82. 1. - Souvenez-vous que si vous
gardez le silence
exactement aux temps marqués,
malgré la démangeaison infinie
que les femmes ont ordinairement
de parler, vous remporterez
une très grande victoire
sur vous-même, le monde et le démon,
et vous serez bientôt sage
et parfaite.
83. 2.- Parlez peu quand vous pouvez
parler, et parlez comme
il faut, sans passion, sans vanité
et sans déguisement ni
politique.
84. 3.- Ne parlez des choses du monde
que pour les condamner;
ne parlez jamais des nouvelles de
la ville, de la cour, de
l'armée, etc.
85. Sanctifiez votre silence par
une oraison vocale ou
mentale, selon votre attrait.
LEUR MÉPRIS DU MONDE
86. 1. Elles regardent leur habit
gris, couvert d'une cape
noire, comme leur suaire qui les
ensevelit et comme l'habit de
la pauvreté de Jésus-Christ,
que le monde a en horreur; c'est
pourquoi, lorsque, tous les matins,
elles le prennent, elles
le baisent amoureusement et, bien
loin d'introduire la mode du
monde en leurs habits, elles choisissent
les étoffes les plus
grossières et les plus rebutantes
à
la nature et à l'esprit du
monde qui domine souvent parmi les
personnes dévotes.
87. 2. Elles évitent comme
un subtil poison, cent modes et
manières du monde que le
Saint-Esprit défend quand il dit: "Ne
vous conformez point à ce
siècle présent et corrompu."
88. 3. Elles ne font aucun cas des
jugements téméraires, des
railleries piquantes, des calomnies
et des persécutions
sanglantes du monde, et même
elles se réjouissent d'être
méprisées, pour Jésus-Christ,
par le plus grand de ses
ennemis.
89. 4. Elles ne s'intriguent point
dans les affaires
temporelles du monde, sous prétexte
qu'il leur en pourrait
revenir quelque profit temporel:
comme les contracts de
société, les loteries,
etc.; qui est vraiment pauvre d'esprit
n'a aucun désir d'un bien
temporel qu'il n'a pas.
90. 5. Elles ne se mêlent point
des affaires temporelles de
leurs parents; ni par conséquent,
elles n'entreprennent aucun
procès, même légitime,
aimant mieux perdre leur robe et leur
cape, que de conserver l'un et l'autre
en perdant la paix du
coeur, la charité du prochain
et la pauvreté d'esprit.
91. 6. Elles n'ont, comme les pauvres,
ni miroir dans leurs
cellules, ni dentelle, ni rubans
de soie, ni dorures dans
leurs pochettes, ni or ni argent
dans leurs cuillères,
fourchettes, couteaux, montres,
croix, reliquaires, etc.;
elles évitent la pratique
de toutes ces choses et de cent
autres, que le monde aime et recherche
contre la pauvreté de
Jésus-Christ.
Conseils
92. 1.- Gardez-vous des personnes
à demi-mondaines, ennemies
de la pauvreté et de la croix
de Jésus-Christ. Quelque habit
de sainteté qui les déguise,
elles sont plus dangeureuses,
dans leurs entretiens, leurs paroles
et leurs conseils, que
les libertins les plus déclarés,
dont on se donne de garde.
93. 2.- Privez-vous, parmi les gens
du monde, de plusieurs
menus plaisirs, qui ne sont point
nécessaires, afin de les
édifier et de vous éloigner
des plaisirs défendus.
94. 3.- Tâchez de pratiquer,
avec l'avis de votre Père
spirituel, tout ce qu'il y a de
plus humiliant et de plus
contraire à la nature, pour
combattre le monde, qui a combattu
et qui combat tous les jours Jésus-Christ,
en sa doctrine, en
ses exemples et en ses serviteurs.
95. 4.- Quand vous êtes en
doute de la vérité et de la bonté
d'une chose, ne dites pas: qu'est-ce
qu'on pense? qu'est-ce
qu'on dit de telle ou telle chose?
mais: qu'est-ce que la foi
m'apprend? qu'est-ce que dit Jésus-Christ?
96. 5.- Regardez toujours le désir
de voir vos parents,
l'envie de savoir de leurs nouvelles,
ou de les aider dans
leur éducation ou leurs affaires
temporelles, comme de grandes
tentations et comme un grand obstacle
à votre perfection et à
votre salut.
97. 6.- Donnez-vous infiniment de
garde de l'esprit mondain
religieux, qui règne dans
la plupart des religions. Cet esprit
consiste:
1) à s'informer de ses parents
et à s'intéresser dans
leurs affaires;
2) à estimer, aimer et rechercher
l'argent et les revenus
temporels, pour se fonder, pour
bâtir une chapelle, etc.,
comme les mondains laïques
aiment et recherchent l'argent pour
faire fortune et figure, pour bâtir
leurs maisons, etc.
3) à rechercher l'entrée
d'une personne riche dans la
communauté, regardant plus
sa clef d'or ou d'argent, qui est
le passe-partout du monde, que l'esprit
de pauvreté de Jésus-
Christ, qui est la clef du royaume
des Cieux;
4) à se plaindre, au dedans
ou au dehors, de la pauvreté
et des incommodités de la
Communauté;
5) à rechercher et à
briguer les charges et les emplois
honorables de la communauté,
comme les mondains, celles du
monde;
6) à parler, avec estime,
des biens du monde et des
talents naturels, et à témoigner
en avoir envie;
7) à mépriser ceux
et celles qui manquent de ces talents
naturels, tels que sont ceux qui
n'ont pas beaucoup d'esprit,
de santé, de savoir-faire,
d'industrie, de science, de biens,
etc.;
8) à rechercher, dans la
commmunauté, toutes ses
commodités, soit dans les
habits, soit dans la chambre, soit
dans les meubles, soit dans ses
repas,
etc.;
9) enfin, l'esprit du monde dans
la religion consiste à
faire, autant qu'on peut, sa propre
volonté; à faire recevoir
ses sentiments préférablement
à ceux des autres, et à se
rendre nécessaire à
sa communauté par son esprit, sa science
et son savoir-faire.
Voilà mes chères filles,
en peu de mots, le plus subtil
poison des religions; gardez-vous
en pour l'amour de Jésus.
98. 7.- Lorsque quelqu'un aura servi
d'instrument à Dieu pour
vous purifier et couronner par des
calomnies et persécutions,
ne manquez pas, par reconnaissance,
de prier pour lui pendant
huit jours, et vous communierez
au moins une fois à son
intention.
LEUR CHARITE POUR LE PROCHAIN
99. 1. La fin de l'institut des Filles
de la Sagesse est,
comme il a été dit,
la charité pure, soit en tenant les écoles
charitables dans les villes ou dans
les campagnes, soit en
gouvernant les hopitaux, soit en
dirigeant les maisons de
retraites, soit en soignant et guérissant
les pauvres
incurables; le tout suivant leurs
talents et l'appel de la
sainte obéissance.
100. 2. Quand Dieu les appelle à
tenir les petites écoles,
elles en gardent exactement toutes
les règles comme elles sont
marquées ci-après
et purement par charité.
101. 3. Si Dieu les appelle à
gouverner quelque hôpital, elles
gardent les règles suivantes
de prudence et de charité.
102. 4. Elles rendent aux pauvres
de l'hôpital tous les
services possibles, soit pour le
spirituel, soit pour le
temporel. Pour le spirituel, avec
dépendance des Aumôniers et
des Curés, et pour le corporel,
avec dépendance des
Administrateurs des hôpitaux,
en sorte qu'elles ne font ni
plus ni moins que leurs supérieurs
ecclésiastiques et laïques
ne leur permettent.
103. 5. Elles doivent s'attendre
à beaucoup`de contradictions
dans les hôpitaux qui sont
gouvernés par beaucoup
d'Administrateurs, et, à
cet effet, elles doivent s'armer
d'une grande patience, pour les
souffrir sans se décourager.
104. 6. Si les Administrateurs de
l'hôpital voulaient les
obliger à retrancher, dans
l'hôpital, quelques-unes de leurs
règles essentielles à
leur institut, elles ne le doivent pas
souffrir et, par l'avis de leurs
premiers Supérieurs de leur
communauté, elles seront
prêtes à en sortir; mais, si la règle
qu'on veut retrancher ou ajouter
n'est pas essentielle ni
contraire à leur institut,
selon le jugement de leurs
Supérieurs, elles s'y soumettront
par charité et obéissance.
105. 7. Elles se confessent ordinairement
à un même
confesseur, qu'elles choisiront
de concert avec leur Mère
supérieure, soit que ce soit
l'Aumônier de l'hôpital, soit que
ce soit le Curé de la paroisse
ou quelque confesseur étranger;
et, si ce confesseur, par son imprudence,
voulait leur faire
transgresser leurs règles,
elles en choisissent un autre; mais
elles ne le quittent que difficilement
et jamais pour de
petites raisons.
106. 8. Elles obéissent, pour
le temporel, aux Administrateurs
des hôpitaux ou autres personnes
qui les ont appelées dans
quelque lieu et qui leur fournissent
la subsistance.
107. 9. Elles se regardent, comme
elles sont en effet, du
nombre des pauvres; mais elles ne
se mêlent que très
difficilement et très rarement
des biens temporels des
hôpitaux où on les
emploie.
108. 10. Leur Supérieure seule
a pouvoir de représenter au
Bureau les besoins temporels des
pauvres ou les leurs propres;
mais si le Bureau n'y fait aucune
attention, ou les contredit
ouvertement, elles demeurent contentes,
sans s'en plaindre à
personne, ni au dehors ni au dedans
de l'hôpital, et sans
employer la médiation de
quelque Administrateur, pour obtenir,
à force d'amis, ce qu'elles
demandent.
109. 11. Elles peuvent avoir en maniement
quelque bien
temporel, dans la salle qu'elles
gouvernent; mais comme elles
reçoivent l'économie
de leurs biens immédiatement de la main
de leur Supérieure qui les
place où elle juge à propos, et non
des mains des Administrateurs, elles
rendent immédiatement
compte de leur économie à
leur Supérieure, et elles ont
immédiatement recours à
elle dans leurs besoins, et ensuite
leur dite Supérieure rend
compte de tout au Bureau ou à
l'économe préposé
par le Bureau dans l'administration des
biens temporels, et, si leur Supérieure,
supposé qu'elles
aient communauté dans le
dit hôpital, leur refuse l'effet de
leurs demandes, quoique justes,
elles ne font aucune démarche
ni au dedans ni au dehors pour l'obtenir,
autrement la
division succéderait à
la paix et à l'obéissance.
110. 12. A la vérité,
elles tâchent de faire en sorte que les
biens des maisons où elles
demeurent soient justement employés
sans voleries ni dissipations; mais
elles n'en répondent pas
s'ils viennent à être
dissipés sans leur faute, parce qu'elles
ne veillent à leur conservation
que par charité.
REGLES DE PRUDENCE, DE FERMETÉ
ET DE CHARITÉ
LES UNES ENVERS LES AUTRES
ET ENVERS LES PAUVRES ET LES ENFANTS
Règles intérieures
111. 1. Elles n'interprètent
jamais en mauvaise part ce qui
n'a que quelque apparence de mal;
et elles excusent sur la
faiblesse, l'ignorance ou la passion,
ce qui est évidemment
mauvais, croyant que Dieu n'a permis
ce mal qui paraît que
pour en tirer un plus grand bien
qui ne paraît pas faute de
lumière.
112. 2. Elles ne croient pas tout
d'abord le mal qu'on leur
rapporte du prochain, quoi qu'on
ne leur dise que par charité
pour y mettre ordre; mais elles
suspendent par charité leur
jugement, jusqu'à ce qu'elles
s'en soient informées, aimant
mieux s'exposer à être
trompées, par charité, que de s'exposer
à faire un jugement téméraire,
faute de charité et de
prudence.
113. 3. Elles ne réfléchissent
jamais volontairement sur la
mauvaise conduite et les défauts
du prochain, et sur les maux
qu'elles en ont reçus.
114. 4. Elles se croient intérieurement
les plus imprudentes,
les plus ignorantes et les plus
méchantes de toutes, malgré le
jugement contraire que forme, en
elles, l'amour propre.
115. 5. Elles renoncent facilement
à leurs lumières
intérieures et à leurs
raisons, même valables, pour
s'assujétir, par charité
et humilité, à celles des autres en
choses indifférentes, et
qui ne sont pas évidemment mauvaises.
116. 6. Elles ne nourrissent jamais,
dans leur coeur, de
secrètes aversions et froideurs
contre quelqu'un; quand elles
les ressentent, quoique malgré
elles, elles les découvrent
toujours à leur Directeur.
Règles extérieures
117. 1. Elles obéissent, même
avec joie qui paraît sur leur
visage, aux commandements de leurs
Supérieurs, quoique contre
leur inclination naturelle.
118. 2. Elles ne se plaignent ni
ne se formalisent jamais de
la conduite de leurs Supérieurs,
devant un particulier qui n'y
peut mettre ordre; et elles ne font
jamais aucune démarche,
pour faire valoir leur sentiment
et leur conduite, au
préjudice de celle d'un Supérieur
qui l'improuve.
119. 3. Elles ne font point paraître
trop d'empressement pour
faire valoir leur sentiment au préjudice
d'une autre; mais
elles cèdent joyeusement,
après avoir dit simplement leurs
raisons.
120. 4. Chacune ne se mêle
que de son emploi, sans prendre de
soi-même inspection sur celui
des autres.
121. 5. Elles n'écoutent point
les plaintes des inférieurs
contre les supérieurs; ou,
si elles les écoutent, elles
tâchent de faire entendre,
au moins extérieurement, aux
inférieurs que leurs plaintes
ne sont pas légitimes, en les
taxant, avec douceur, d'impatience,
d'orgueil, de murmure,
etc., et elles approuvent la conduite
de leurs supérieurs,
autant que la vérité
le permet.
122. 6. Elles ne découvrent
jamais aux pauvres qu'elles
gouvernent, quelque affidés
qu'ils soient, les secrets et les
règles de la Communauté,
ni ne leur déchargent jamais leur
coeur, quand elles ont quelque sujet
de chagrin.
123. 7. Elles ont une grande affabilité
et ouverture de coeur
les unes envers les autres; et se
traitent mutuellement avec
beaucoup de respect et d'amitié,
évitant, d'un côté, un
certain air dédaigneux, réservé
et particulier qui est
contraire à la charité,
et, de l'autre, une trop grande
familiarité et des manières
badines et puériles qui engendrent
le mépris.
124. 8. Elles s'excusent mutuellement
dans leurs défauts, et
s'entresoutiennent toutes contre
les rapports, médisances,
calomnies et persécutions.
125. 9. Elles évitent toute
duplicité, agissant ensemble avec
beaucoup de candeur et d'ouverture
de coeur.
126. 10. Elles s'avertissent charitablement,
en secret, de
leurs défauts, et elles reçoivent
de bon coeur les corrections
qu'on leur fait.
127. 11. Elles évitent les
paroles hautaines et arrogantes,
les cris immodérés,
les comparaisons odieuses, et une infinité
de défauts qui rompent ou
altèrent la charité.
128. 12. Elles tâchent d'être
également charitables et fermes
envers les pauvres: par la charité,
elles les supportent et
les excusent, dans leurs faiblesses,
ignorances et défauts de
corps et d'esprit, et même
dans leurs péchés; par la fermeté,
elles les punissent, sans respect
humain, de leurs fautes de
malice, de leur orgueil à
leur tenir tête, de leur
désobéissance aux
règles et aux Supérieurs, particulièrement
quand ces fautes sont publiques
et scandaleuses. Si elles
laissent de telles fautes impunies,
en des particuliers, leur
charité dégénère
en une connivence condamnable, elles
détruisent l'ordre et la
règle de la communauté, et elles
donnent lieu aux méchants
d'en faire autant et plus. O qu'il
est difficile de trouver l'heureux
milieu qui est entre la
douce charité et la fermeté
sévère, et qu'il faut
nécessairement trouver, pour
bien gouverner les pauvres et les
enfants. Si on est trop doux, en
se contentant seulement
d'avertir les défaillants,
sans user d'un châtiement prudent,
on augmente le mal par une molle
condescendance; et, si on est
trop sévère, en châtiant
avec rigueur, on irrite le mal. C'est
pourquoi elles unissent ordinairement,
dans les écoles et dans
les hôpitaux, l'huile et le
vinaigre, la récompense et le
châtiement; en sorte cependant
que l'huile du pardon surnage
sur le vinaigre du châtiment.
129. 13. Elles rendent tous les services
qu'elles peuvent aux
pauvres, pour l'âme et le
corps, se faisant toutes à tous, et
les dernières de tous, persuadées
qu'elles sont que la
première, parmi elles, n'est
pas la plus élevée, la plus
riche, la plus savante; mais celle
qui se croit et se met la
dernière de toutes.
130. 14. S'il arrive à quelqu'une
de dire à une autre Soeur
quelque parole dure, de mépris
ou de reproche, elle lui en
demande pardon, à genoux,
et elle baisera la terre. La Soeur
offensée en fera de même
par humilité, usant de quelque parole
de cordialité qui marquera
sa réconciliation: elle le fera, en
présence de la Mère
Supérieure, et jamais en son absence.
131. 15. Elles appellent leur Supérieure
Mère simplement, et
les deux qui tiennent sa place,
Mères assistantes; elles ne se
nomment, entre elles, que Soeurs,
et elles se préviennent
d'honneur et de respect, faisant
une révérence en passant les
unes devant les autres.
132. 16. Elles évitent soigneusement
toutes singularités,
c'est-à-dire qu'elles ne
font rien d'extraordinaire, à
l'extérieur, de leur propre
volonté, sous prétexte d'une plus
grande perfection.
LEURS PRIERES ET ORAISONS
133. 1. Elles font, tous les matins,
depuis quatre heures et
demie jusqu'á cinq heures
et demie, une heure d'oraison, et,
le soir, depuis cinq heures et demie
jusqu'à six; et tous les
jours, elles récitent le
saint Rosaire tout entier. Quand
elles sont dans la Communauté,
elles le psalmodient à deux
choeurs et à trois temps,
et, quand elles sont dans l'exercice
de la charité, elles le récitent
quand elles peuvent; mais
elles n'y manquent point.
134. 2. Elles font, toutes les semaines,
au moins une heure
d'adoration du Saint-Sacrement;
tous les mois, un jour de
retraite, et, tous les ans, une
retraite de dix jours.
Conseils
135. 1.- Prenez garde de quitter
votre oraison à cause de vos
distractions, troubles et ennuis,
à cause qu'il vous semble
que vous n'y faites rien, que vous
êtes trop grossières pour
la faire, que vous n'y êtes
pas appelées, que votre vocation
est le travail manuel et l'action,
et non pas la contemplation
ni l'oraison; ce sont des tentations
du malin esprit.
136. 2.- Dans toutes vos prières,
nourrissez-vous, autant que
vous pouvez, de la foi pure sans
vous appuyer sur les choses
visibles et sensibles. Estimez les
goûts spirituels; mais n'en
concevez pas plus d'estime pour
vous, quand vous les avez, et
ne croyez pas que tout soit perdu,
quand vous n'en avez plus.
137. 3.- Prenez garde d'agir trop
dans l'oraison, ne donnant
pas assez lieu à l'opération
de Dieu qui n'opère que dans la
paix.
138. 4.- Faites toutes vos oeuvres
en la présence de Dieu et
pour Dieu seul, c'est prier toujours;
sans manquer de dire
tout entier le saint Rosaire, pour
honorer la vie, la mort et
passion, et la gloire de Jésus
et de Marie.
LEUR DEVOTION ENVERS LA SAINTE VIERGE
139. 1. Elles regardent la Sainte
Vierge comme la Supérieure
et la Mère de toute la Communauté.
En son honneur, elles
récitent le saint Rosaire
tous les jours; elles donnent à
manger à un pauvre tous les
jours; elles jeûnent, autant que
leur santé le permet, tous
les semaines, un jour, qui est
ordinairement le samedi.
140. 2. Quand elles ont le temps,
elles récitent le Petit
Office en son honneur.
141. 3. Elles tâchent d'imiter
toutes ses vertus, mais
particulièrement sa charité,
son humilité, sa pureté, sa
fidélité et sa modestie.
142. 4. Elles parlent souvent de
ses grandeurs et de ses
miséricordes, et défendent
son culte contre les libertins, les
critiques et les hérétiques.
143. 5. Elles disent, en son honneur,
un Ave Maria quand elles
entendent sonner l'heure.
144. 6. Leur dévotion envers
la Sainte Vierge est intérieure
sans hypocrisie, extérieure
sans critique, tendre sans
indifférence, constante sans
légèreté, et sainte sans
présomption, n'étant
point de ces dévots: 1 scrupuleux, qui,
en honorant la Mère, craignent
de déshonorer le Fils; 2 de
ces dévots critiques, qui
critiquent les pratiques extérieures
et solides de dévotion envers
la Sainte Vierge; 3 de ces
dévots inconstants, qui ne
lui sont dévots que pour un temps;
4 de ces dévots présomptueux,
qui joignent le péché avec la
dévotion à la Sainte
Vierge, et qui, sous le manteau de la
Mère, crucifient et déshonorent
le Fils.
LA FREQUENTATION DES SACREMENTS
145. 1. Elles vont régulièrement
à confesse, tous les huit
jours, et au même confesseur
marqué par la Communauté.
146. 2. Elles peuvent cependant,
avec la permission de la
Supérieure, aller à
confesse à un autre confesseur, lorsque la
nécessité le requiert.
147. 3. Elles n'ont point de jours
de communion absolument
déterminés; cependant
elles communient le plus souvent
qu'elles peuvent, selon leur désir
et l'avis du Directeur et
de la Supérieure.
148. 4. Elles ne s'écartent
point de la Communauté pour courir
les dévotions; mais elles
entendent la messe de Communauté, et
y communient toutes ensemble, autant
qu'elles peuvent.
149. 5. Elles ne manquent jamais
de faire une demi-heure au
moins d'action de grâce après
la sainte Communion, à moins
qu'il ne survienne une vraie nécessité
de quitter Dieu pour
Dieu.
150. 6. Quoiqu'elles aient, de leur
Directeur, la permission
de communier, elles ne le font cependant
qu'avec la permission
de leur Supérieure, à
laquelle elles la demandent à genoux;
et, la veille de la communion générale,
aux grandes fêtes de
l'année, elles se mettent
toutes à genoux devant leur
Supérieure, afin qu'elle
défende la communion à qui il lui
plaira, ou l'accorde à toutes.
151. 7. Elles ne font jamais entre
elles, ni à personne,
reproche de la communion, et n'entrent
jamais en jalousie
contre leurs Soeurs qui communient
plus souvent.
Conseils
152. 1. Ne vous attachez jamais à
la Sainte Communion de telle
sorte que le refus que votre Supérieure
vous en fait vous
trouble et vous chagrine; car un
acte d'obéissance vaut mieux
que la Sainte Communion.
153. 2. Ne manquez point de demander
la Sainte Communion à
votre Directeur et à votre
Supérieure lorsque vous en sentez
le désir, quoiqu'on vous
l'ait refusée plusieurs fois; souvent
l'orgueil qui craint le refus est
la cause de cette omission.
154. 3.- Prenez garde de communier
par routine, par respect
humain, par amour-propre, par vanité,
par esprit de
singularité.
155. 4.- Ne communiez pas pour avoir
les goûts spirituels qui
accompagnent cette divine action;
mais pour y sacrifier toutes
choses à Jésus crucifié
et anéanti.
156. 5.- Si quelque pensée,
devant ou après la sainte
communion, vous trouble et vous
inquiète, rejetez-la
promptement, car le démon
en est l'auteur, et non pas le
Saint-Esprit, qui est l'auteur de
la paix.
157. 6.- N'exécutez jamais
aussitôt et sans avis de votre
Directeur, les bons desseins que
Dieu vous donne dans la
sainte communion; car on doit autant
craindre les illusions du
malin esprit dans la sainte communion
que dans les autres
actions spirituelles, comme on expérimente
tous les jours.
158. 7.- Tâchez de communier
toujours par la Sainte Vierge,
renonçant à vos propres
dispositions, et vous revêtant de
celles de la Sainte Vierge, quoique
inconnues, et faisant
encore reposer Jésus-Christ
dans son sein virginal, en esprit
et en vérité.
159. 8.- Gardez-vous des scrupules
dans la confession et la
communion. La propre volonté,
l'attache à son jugement,
l'orgueil secret engendrent et augmentent
les scrupules; mais
l'obéissance aveugle d'entendement
en est l'unique victoire.
160. 9.- Appliquez-vous, dans la
confession, beaucoup plus à
vous exciter à la contrition
qu'à rechercher vos péchés, et,
dans la sainte communion, plaisez-vous
plus dans la haine et
l'anéantissement de vous-mêmes
que dans les douceurs
intérieures, les lumières
et le repos sensible de l'âme.
LEURS TRAVAUX MANUELS
161. 1.- Elles travaillent à
différents ouvrages, dans le
temps où la règle
commune ne prescrit point d'exercice.
162. 2. Elles reçoivent et
rendent leurs ouvrages à celle des
Soeurs qui a ce soin, sans s'informer
à qui ils sont et quel
est leur prix.
163. 3. En travaillant, elles ne
se donnent pas tout entières
à leur ouvrage, y évitant
l'empressement, la curiosité, la
vanité et la mondanité.
C'est pourquoi elles ne font point
d'ouvrages mondains, que la mode
n'a inventés que pour
satisfaire la vanité et l'orgueil,
et elles ne travaillent
jamais hors de la maison.
Conseils
164. 1.- Prenez garde à l'empressement
et à l'attache à votre
ouvrage pendant le travail, et à
la vanité et à la
complaisance après l'avoir
fait.
165. 2.- Prenez garde de travailler
comme le monde, par le
principe de l'intérêt,
du plaisir ou de l'honneur; mais par
esprit de pénitence et de
charité.
166. 3.- Choisissez à faire
l'ouvrage où vous avez le moins
d'inclination naturelle; et, lorsque
le démon vous tente
d'empressement, arrêtez-vous
quelque temps sans travailler.
167. 4.- Prenez garde d'employer
à l'oraison le temps marqué
pour le travail.
LEUR MORTIFICATION
168. 1. Elles n'ont point de mortification
extérieure de
règle; toutes les mortifications
extérieures qu'elles font,
comme la discipline, le cilice,
la ceinture piquante, etc.,
sont entièrement volontaires,
et dirigées par le Directeur et
la Supérieure.
169. 2. Cependant, quand elles se
portent bien, elles jeûnent
le samedi et font abstinence de
viande le mercredi.
170. 3. Elles s'appliquent courageusement
à la mortification
de leurs sens et de leurs puissances,
mortifiant leurs yeux,
leur odorat, leur goût, leur
esprit, leur volonté, etc., dans
leurs affections déréglées
ou inutiles.
171. 4. Les novices, pendant leur
noviciat, rendent compte,
toutes les semaines, de leur intérieur,
à la Maîtresse des
novices, et les professes, tous
les mois, au Directeur ou à la
Mère Supérieure.
Conseils
172. 1.- Prenez garde de croire que
la mortification du corps
ne vous est pas nécessaire
pour acquérir la Sagesse; car elle
ne se trouve point chez ceux qui
vivent à leur aise et selon
les sens.
173. 2. Soyez persuadées que
vous n'avancerez dans la vertu
qu'autant que vous vous ferez de
violence, en faisant ou
souffrant des choses contraires
à votre humeur.
174. 3.- Ne négligez pas les
petites mortifications, qui sont
souvent plus méritoire que
les plus grandes, parce que la
vanité s'y trouve moins.
175. 4.- Mortifiez vos yeux et vous
serez modestes; mortifiez
votre ouïe et vous serez charitables;
mortifiez votre odorat
et votre goût et vous serez
sobres; mortifiez votre langue, et
vous serez sages; mortifiez votre
toucher, et vous serez
chastes.
176. 5.- Mortifiez:
1) l'activité naturelle,
qui vous porte à aller vite, à
en faire beaucoup;
2) l'humeur qui vous domine, et
qui déplaît à votre
prochain;
3) votre langue, qui veut toujour
parler, rire, railler,
etc.;
4) l'immodestie dans le maintien
du corps, qui excite à
badiner, comme un enfant; à
éclater en riant comme un fou; à
sauter et à se jeter de côté
et d'autre comme un bâteleur; et
enfin à manger et à
boire sans règle, comme une bête.
177. 6.- Prenez garde de tomber dans
l'excès et
l'indiscrétion, en matière
de mortification, faute
d'obéissance, et dans la
tiédeur, faute de mortification.
178. 7.- Soyez bien persuadées
que la moindre petite
mortification faite pour Dieu, par
exemple: se priver de dire
une parole inutile, arrêter
ses regards, étouffer un mouvement
de colère, d'impatience,
etc., est une plus grande victoire
que de conquérir toute la
terre et une plus grande action que
de créer un monde: c'est
ce que disent les saints.
179. 8.- Attachez-vous surtout à
la mortification de votre
volonté propre en la soumettant
à toute sorte d'obéissance,
pour l'amour de Dieu.
LEURS REPAS
180. 1. Elles dînent et soupent,
dans les écoles et les
hôpitaux ou autres maisons
où elles sont appelées, à l'heure
la plus commode, après que
les pauvres ont mangé ou que les
écoles sont finies, c'est-à-dire
ordinairement, entre onze
heures et midi; et, dans la Communauté,
elles dînent toujours
à onze heures et demie.
181. 2. Elles mangent indifféremment
toutes sortes de viandes,
selon que la divine Providence,
leur mère, le leur fournit, et
on s'en rapporte à leur mortification,
pour se priver, dans
leurs repas, de ce qu'elles aiment
le plus selon la nature.
182. 3. Elles ne mangent jamais hors
de la Communauté, ni
entre leurs repas, sans une vraie
nécessité et une permission
expresse, ce qui sera très
rare.
183. 4. Elles écoutent attentivement
la lecture de table, sans
causer ni regarder çà
et là; et, si elles y ont besoin de
quelque chose, elles le marquent
par signe, ou le disent tout
bas, à l'oreille de celles
qui servent à table, et elles
gardent toutes les règles
de la modestie ci-après.
184. 5. Elles ne se singularisent
point, quand elles mangent
en communauté, soit en demandant
quelques mets ou apprêts
particuliers, soit en se privant
de tout ce qu'on leur
présente. Elles peuvent cependant
se priver de quelques mets,
mais sans que cela paraisse trop.
185. 6. Quand on leur donne, à
table, quelque viande qui n'est
pas selon leur goût, ou qui
est très mal apprêtée, elles se
gardent bien d'en témoigner
leur peine, par leurs paroles,
leur mine ou leurs signes, soit
à table, soit hors de table,
dans la récréation;
si elles ne sont pas assez mortifiées pour
manger des choses contre leur inclination,
du moins qu'elles
ne s'en plaignent pas.
186. 7. Toutes celles qui savent
bien lire, font tour à tour
la lecture au réfectoire,
et chacune y sert, à son rang, et
même la Supérieure.
Conseils
187. 1.- Quand vous allez à
table, soupirez sur la servitude
où vous êtes réduites,
comme les bêtes, et pour ne pas leur
ressembler tout-à-fait, renoncez
au plaisir sensuel que la
nature prend nécessairement,
et élevez votre coeur à Jésus -
Christ, pour unir vos repas aux
siens.
188. 2.- Ne parlez jamais comme les
gens du monde de ce qu'on
vous a servi à table, de
ce qui était bon ou non; ne dites
jamais à la récréation:
que telle viande était bonne! j'ai
bien mangé de ceci ou de
cela; cela m'a donné appétit, etc.
189. 3.- Prenez garde de regarder,
par gourmandise et
jalousie, les portions de celles
qui sont à côté de vous pour
les examiner et les confronter avec
la vôtre.
190. 4.- Trempez en esprit le premier
morceau que vous
mangerez dans le sang de Jésus-Christ,
et unissez ce morceau
au Pain des Anges, c'est-à-dire
à Jésus-Christ que vous avez
reçu en votre dernière
communion.
191. 5.- Prenez bien garde à
un défaut ordinaire parmi les
personnes de communauté,
savoir: qu'elles disent la
bénédiction des viandes
et l'action de grâces sans attention
ni dévotion, mais seulement
par routine, pensant quelquefois à
ce qu'elles ont mangé ou
à ce qu'elles ont à faire après le
repas, se curant les dents, et tenant
quelquefois des postures
immodestes.
LEUR RECREATION
192. 1. Elles font, tous les jours,
deux heures de récréation;
la première après
le dîner, et la deuxième après le souper,
dans lesquelles elles parlent entre
elles avec liberté, gaîté
et sainteté.
193. 2. Elles se récréent
avec liberté et gaîté; mais sans
immodestie, sans ris immodérés,
sans jeux d'enfants et
d'écoliers et sans postures
indécentes. Elles évitent, d'un
autre côté, une retenue
trop sévère et scrupuleuse, un certain
air sombre, rêveur et mélancolique,
une certaine humeur
critique et singulière, et
un certain quant-à-moi élevé et
orgueilleux.
194. 3. Elles se récréent
avec sainteté, n'ayant d'autre
intention que de se reposer saintement
en Dieu et comme Dieu
quand il eut créé
le monde, ou comme Jésus-Christ quand il se
reposa sur le puits de Jacob, ou
comme les Saints qui ont fait
cette action par de saints motifs:
tantôt par charité, pour
être plus capables de servir
les pauvres et d'aider le
prochain, et pour réjouir
les Soeurs; tantôt par humilité,
pour avouer qu'on est trop faible
et
qu'on a besoin de ce
petit relâchement; tantôt
pour porter avec joie le prochain à
la pratique de la vertu, qui de
soi-même paraît sévère, etc.
195. 4. Elles sont, dans la récréation
plus qu'en aucun autre
temps, sur leurs gardes, pour ne
pas blesser la charité, soit
par des railleries, soit par des
reproches, soit par des
soupçons manifestes, soit
par des critiques, soit par des
gestes dédaigneux, soit par
des paroles de colère, etc.
196. 5. Elles n'y parlent, ni ne
doivent parler ordinairement,
que de Dieu et des choses de Dieu,
et jamais de celles du
monde, des nouvelles et des vanités
du siècle.
197. 6. Elles font la récréation
toutes ensemble, sans se
séparer que par nécessité
et permission, et elles n'y font
aucune amitié particulière,
conversant plus souvent avec l'une
au'avec l'autre.
Conseils
198. 1.- Avant de vous récréer,
comme avant de manger,
renoncez à la satisfaction
de la nature, et élevez votre coeur
à Dieu.
199. 2.- Ne faites point difficulté
de vous réjouir
modestement et de réjouir
vos soeurs, qui sont les enfants de
Dieu, votre Père, et croyez
qu'il vous a donné la commission
de les réjouir, dans la récréation,
pour les rendre plus
capables de son service.
200. 3.- Si quelqu'une de vos Soeurs
vous donne quelque sujet
de peine, souffrez-le sans rien
dire; si elle dispute contre
vous, cédez et vous remporterez
la victoire.
201. 4.- Pendant la récréation,
élevez de temps en temps votre
coeur à Dieu.
LEUR FOI
202. 1. Comme la foi est le fondement
de toute la religion,
elle l'est aussi de toute sagesse
et de toute perfection:
c'est pourquoi les Filles de la
Sagesse en font leur pain
quotidien, en toutes leurs pensées,
paroles et actions.
203. 2. Elles font toutes leurs actions
pour la plus grande
gloire de Dieu, en union de Jésus
et de Marie; et elles
renouvellent cette intention, de
temps en temps, quand
l'action est longue.
204. 3. Elles évitent de faire
leurs actions par vanité, par
sensualité, par respect humain,
par passion, par nature ou par
coutume; mais en tout ce qu'elles
font, elles ont une vue de
foi qui les anime et les soutient,
en sorte que, si on leur
demandait pourquoi elles font telle
chose, elles pussent
répondre en vérité:
c'est pour Dieu seul, par tel ou tel motif
chrétien.
205. 4. Dans leurs doutes, elles
ne consultent ni l'esprit
humain, ni la coutume, ni leurs
amis intéressés, mais
seulement le saint Evangile et leurs
Règles expliquées par
leur Directeur.
206. 5. Elles ne désirent
point de visions ni de révélations,
ni autres lumières extraordinaires,
puisque la seule foi leur
suffit; mais si, par la volonté
de Dieu, elles en avaient,
elles les découvrent à
leur Directeur; elles ne s'y appuient
aucunement, craignant l'illusion,
qui se glisse ordinairement
dans les choses extraordinaires.
207. 6. Elles font à Dieu
la prière des Apôtres: "Seigneur,
augmentez-nous la foi", ou celle
des dévots de la Sainte
Vierge: "Vierge fidèle, priez
pour nous", ou celle de
l'Eglise: "Credo".
LEUR HUMILITE
208. 1. Elles ne croient d'elles-mêmes
que du mal et de la
misère, ne s'appuyant jamais
sur leurs propres pensées,
propres volontés, propres
actions et préparations, et
renonçant, en toutes leurs
meilleures actions, à leurs mauvais
fonds qui corrompt tout.
209. 2. Elles croient, malgré
le jugement contraire de leur
amour propre, que les autres sont
meilleures qu'elles, quoique
leur bien ne leur paraisse pas évidemment,
à cause de leur peu
de lumières.
210. 3. Elles évitent la vanité
et l'orgueil dans leurs
pensées et leur paroles,
sans réfléchir volontairement sur
leurs vertus et leurs bonnes ouevres,
et sans parler d'elles
ni en bien, ni en mal.
211. 4. Elles ne répondent
rien à ceux qui leur donnent des
louanges, soit qu'elles soient vraies,
soit qu'elles soient
fausses, s'humiliant intérieurement
devant Dieu, et laissant
croire, à ceux qui les louent,
ce qu'ils voudront de leur
silence.
212. 5. Elles choisissent toujours,
en quelque lieu qu'elles
soient, la dernière place,
quand particulièrement elles
traitent avec des étrangers
qui ne sont pas de leur
Communauté; elles prennent
la dernière place à table et dans
la conversation, qui est ordinairement
la plus proche de la
porte; quand elles sont trois, elles
évitent le milieu qui est
le plus honorable; quand elles marchent
dans les rues, elles
prennent le bas du pavé,
proche du ruisseau, et le bas de
l'église, quand elles y entrent.
213. 6. Quand elles conversent entre
elles, la simplicité
cordiale doit l'emporter sur l'humilité
extérieure, se mettant
bonnement où elles se trouvent,
évitant les compliments du
monde.
214. 7. Elles choisissent plus volontiers
les emplois les plus
bas et les plus méprisés.
215. 8. Elles tâchent de ne
se point excuser, quand on les
accuse injustement, et elles ne
contestent jamais avec
personne.
LEUR MODESTIE
216. 1. Elles composent leur extérieur,
uniquement pour plaire
à Dieu et pour édifier
le prochain, sans affectation ni
hypocrisie, et autant en particulier
qu'en public.
217. 2. La modestie étant,
au rapport des Saints, une portion
de la divinité, un rejaillissement
du Saint-Esprit et une
véritable richesse devant
Dieu, elles pratiquent cette grande
vertu, en tous les mouvements de
leurs corps, et elles en font
leur étude particulière.
Leur modestie dans le visage et la vue.
218. 1 . Elles tiennent ordinairement
la tête droite, sans la
lever ni la baisser trop, sans la
pencher d'un côté ou
d'autre, sans la soutenir de la
main, sans la branler à chaque
mot, et sans la tourner çà
et là à la moindre occasion.
219. 2. Elles n'ont point les yeux
égarés, ni aussi arrêtés
trop fixement sur ceux qu'elles
regardent, mais un peu
baissés, et leur mouvement
n'est ni trop fréquent ni trop
précipité. Leurs regards
sont humbles, doux et respectueux, et
jamais rudes, dédaigneux,
audacieux ni farouches.
220. 3. Elles ne font point coutume
de tenir la bouche
ouverte, ni les lèvres trop
serrées; elles tâchent de ne se
moucher ni de cracher pas d'une
manière qui fasse peine aux
autres; elles tâchent de ne
bâiller pas devant les autres.
221. 4. Elles évitent de rider
le front, de froncer les
sourcils, de se ronger les ongles,
de se nettoyer le nez ou
les oreilles avec les doigts.
222. 5. Elles s'abstiennent d'éclater
de rire, aussi bien que
de rire trop souvent; mais aussi
elles ne sont point tristes,
mornes, trop sérieuses et
trop graves.
223. 6. Elles évitent les
grimaces, les mines contrefaites,
tout ce qui marque quelque artifice
ou quelque dissolution.
Elles tâchent d'avoir un visage
gai, serein, ouvert,
tranquille, sans affectation, sans
contrainte, qui ait un air
de bonté, de douceur et de
piété, capable de gagner les coeurs
et de les porter à Dieu.
Leur modestie dans la posture du corps.
224. 1. Ordinairement, elles tiennent
leur corps droit, sans
le courber ni pencher de côté
ou d'autre, sans contrainte
cependant et sans affectation.
225. 2. Elles ne s'appuient point
tantôt sur un pied, tantôt
sur un autre; elles ne changent
point, à tout moment, de
situation et de posture; ce qui
est, selon les saints Pères,
une marque de légèreté.
226. 3. Elles ne tiennent point les
mains sur le côté ni
derrière le dos; elles ne
les portent point au visage, ni en
quelque autre endroit du corps sans
quelque nécessité.
227. 4. Elles s'abstiennent de ces
lâches et molles extensions
de bras et de jambes, qui viennent
ordinairement d'un fond de
paresse et de négligence.
228. 5. Elles ne s'accoudent, ni
ne s'appuient, ni ne se
penchent indécemment, ni
ne croisent les pieds, ni ne se
mettent les jambes l'une sur l'autre.
Leur modestie dans le parler.
229. 1. Elles ne parlent ni trop
ni trop peu, n'étant pas de
ces causeuses et bien disantes qui
ne donnent pas aux autres
le temps de parler, ni de ces taciturnes
qui par leur silence
mal réglé, sont ordinairement
fort à charge dans les
conversations.
230. 2. Elles n'interrompent point
ceux qui parlent, ni ne
préviennent point, par une
réponse précipitée, ceux qui les
interrogent.
231. 3. Elles règlent tellement
le ton de la voix, qu'il ne
soit ni trop haut ni trop bas, aigre
ni doucereux, rude ni
efféminé, rustique
ni languissant; et elles ne se servent
jamais d'un ton magistral, impérieux,
méprisant et passionné.
232. 4. Elles condamnent les paroles
de mensonge, de
raillerie, de mépris, de
bouffonnerie, de flatterie, de vanité
et toutes les autres qui peuvent
blesser la bienséance ou la
charité.
233. 5. Elles ne s'empressent point
à dire, les premières,
leur avis sur les sujets qui se
présentent, comme si elles
étaient plus capables d'en
juger que les autres; et,
lorsqu'elles le donnent, après
en avoir été requises, c'est
toujours avec simplicité,
et, si les choses leur paraissent
douteuses, elles n'en parlent pas
d'une manière décisive et
trop hardie.
234. 6. Elles évitent toutes
sortes de contestations et de
disputes; et elles aiment mieux
remporter la victoire en
cédant, comme si elles s'étaient
trompées, qu'en contestant
avec chaleur et orgueil.
235. 7. Enfin elles pèsent
toutes leurs paroles avant de les
prononcer.
On a parlé de la modestie
de leurs habits.
Leur modestie dans le marcher.
236. 1. Elles ne marchent point d'un
pas trop vite et trop
précipité, ne courant
jamais que par une vraie nécessité.
Selon cette règle, quand
elles montent ou descendent un
escalier, elles ne montent ni ne
descendent pas plus d'une
marche à la fois.
237. 2. Elles ne marchent point trop
lentement, traînant les
pieds, ou ne les levant qu'avec
négligence.
238. 3. Elles évitent de marcher
avec affectation, par ressort
et par machine, allant à
pas comptés et étudiés, etc.
239. 4. Elles évitent, en
marchant, toutes ces sortes
d'agitations de tête, de mains,
de bras, d'épaules et de
corps, que les Saints condamnent
de légèreté.
240. 5. Lorsqu'elles sont obligées
de faire quelques visites
en ville, elles y évitent
de parler trop haut, de rire avec
éclat, de badiner et de folâtrer;
de regarder dans les
boutiques, les carrosses ou autres
lieux, avec curiosité; de
s'arrêter dans les coins des
rues, pour lire les affiches et
pour voir des masques ou des charlatans;
enfin elles fuient,
autant qu'elles peuvent, les foires,
les places publiques, et
autres lieux où la vanité
règne et où Jésus-Christ ne se
trouve point ordinairement.
Leur modestie dans l'église.
241. 1. Elles ne vont à l'église
qu'en habit décent, avec leur
cape, la tête modestement
couverte.
242. 2. Elles n'y entrent qu'avec
un extérieur plein de piété
et de religion, prenant, en entrant,
de l'eau bénite, se
mettant à genoux ordinairement
au bas de l'église par
humilité.
243. 3. Si elles passent devant le
Saint-Sacrement, elles font
une profonde révérence,
et, quand c'est devant un autre autel
ou une image d'un Saint, une médiocre
révérence.
244. 4. Elles ne passent jamais par
une église, pour abréger
leur chemin; elles n'y parlent que
par nécessité, et tout bas
et en peu de mots: ce qu'elles observent
dans la sacristie,
qui est une partie de l'église.
245. 5. Elles règlent, particulièrement
dans l'église, leurs
regards, leur contenance et leur
posture; mais de telle sorte,
que leur dévotion soit sans
grimaces, sans indécence, et sans
aucun geste ou mouvement de corps
extraordinaire. Elles
assistent ordinairement à
la Sainte Messe, à genoux, les yeux
modestement baissés ou arrêtés
sur l'autel, les mains croisées
sur leur poitrine sous leur cape;
elles peuvent s'asseoir
pendant le sermon ou se tenir debout.
Quand la faiblesse ou la
lassitude ne leur permet pas de
se tenir à genoux, elles
peuvent s'asseoir modestement.
LEUR RETRAITE DOMESTIQUE
246. 1. Quoiqu'elles ne puissent
pas garder la clôture exacte,
comme dans les couvents, parce qu'elles
sont obligées de
pratiquer, au dehors, la charité
envers le prochain, cependant
elles doivent garder une espèce
de clôture particulière, qui
est d'autant plus difficile qu'elles
sont entourées du monde
et mêlées avec les
hommes.
247. 2. En quelque lieu qu'elles
soient, elles ont chacune
leur cellule et appartement, qui
n'a pas de communication avec
les étrangers, ni même
avec les pauvres des hôpitaux, ni les
enfants des écoles.
248. 3. Elles ne laissent point,
comme il a été dit, entrer
d'étrangers, ni hommes, ni
femmes, dans leur chambre, sans une
absolue nécessité
et une permission expresse.
249. 4. Quand on les vient visiter,
elles descendent de leur
chambre, pour parler aux étrangers,
dans une chambre basse
destinée à cet effet.
Elles peuvent cependant, par amour de la
retraite, refuser d'aller au parloir,
avec permission de la
Supérieure.
250. 5. Quand elles vont au parloir,
elles ne le font qu'après
avoir dit un "Veni sancte Spiritus"
et une "Ave Marie" dans
l'oratoire public ou la chapelle;
ensuite elles parlent aux
étrangers avec honnêteté,
sagesse, modestie et brièveté, étant
toujours les premières à
abréger les entretiens.
251. 6. Elles ne vont jamais au parloir
ou au dehors, qu'avec
leur cape qui les ensevelit, comme
un drap mortuaire.
252. 7. Elles ne reçoivent
ni n'écrivent aucune lettre au
dehors, qu'elles n'en aient reçu
permission de la Supérieure,
et qu'elles ne les lui aient montrées,
quand elles les ont
écrites.
253. 8. Au retour de la ville ou
du parloir, elles vont se
recueillir à l'oratoire ou
à la chapelle.
LA CONFERENCE DES COULPES
254. 1. Le chapitre des coulpes se
tient toutes les semaines,
au jour le plus commode, savoir:
le dimanche ou la fête.
255. 2. Lorsque les Soeurs entendent
sonner la cloche, elles
s'y rendent promptement, se mettent
à genoux, font la prière
ordinaire, et, au signal de la Supérieure,
ayant baisé la
terre, elle se mettent dans leur
place.
256. 3. La fin de cette action, commune
à toutes les
Communautés bien réglées,
est d'humilier l'esprit et de
mortifier la chair qui refait la
découverte de ses défauts.
257. 4. Elles s'accusent seulement
des fautes extérieures qui
ont paru devant quelqu'une de leurs
Soeurs, et jamais des
fautes purement intérieures.
258. 5. Elles s'accusent simplement,
en peu de mots;
sincèrement, sans rien cacher;
humblement, sans s'excuser; et
charitablement, sans accuser personne
ni découvrir les défauts
d'autrui.
259. 6. Quand elles sont accusées,
par la Supérieure, de
quelques fautes extérieures
qu'elles n'ont pas faites, elles
ne s'en excusent point publiquement,
mais elles reçoivent
humblement la pénitence.
A plus forte raison, ne doivent-elles
rien dire, quand la Supérieure
les querelle ou les réprimande
pour des fautes qu'elles ont commises.
Si cependant la
Supérieure leur ordonne de
parler ou les interroge, elles
répondent simplement.
260. 7. Celle qui s'accuse se vient
mettre à genoux dans un
lieu marqué, les yeux baissés
et les mains jointes. Quand elle
a écouté les avis
et reçu la pénitence de la Mère-Supérieure,
elle baise la terre, et, au signal
de la Supérieure, elle s'en
retourne.
261. 8. Chacune doit avoir meilleure
opinion et plus d'estime
d'une Soeur qui s'est accusée
naïvement de ses fautes quoiques
grièves, qu'elle n'avait
auparavant, parce que, n'ayant pu
douter qu'elle ne fût pécheresse,
elle a appris, par sa
confession, qu'elle est humble,
qu'elle aime l'humiliation, et
qu'elle a effacé sa faute
par son humiliation.
262. 9. Les Officières qui,
par leurs emplois, sont obligées
de rompre quelques points de la
règle, comme le silence, ne
s'en accusent point, quand elles
n'ont pu s'en dispenser.
263. 10. Ell es ne parlent jamais,
hors du Chapitre, de ce qui
s'y est passé. Ce secret
leur est très étroit, et il approche
de si près de celui de la
confession, qu'on ne peut le rompre
sans péché.
264. 11. Elles peuvent, tous les
soirs, s'accuser, à la prière
du soir, des fautes publiques qu'elles
ont faites dans la
journée.
LES OFFICIERES
265. 1. Parmi les Soeurs de la Sagesse,
comme dans toutes les
autres communautés bien réglées,
il y a plusieurs emplois qui
sont distribués aux Soeurs
par la Supérieure, et qu'on nomme
du nom de l'emploi qu'elles exercent,
entre lesquelles sont:
1 L'infirmière, 2 La sacristine,
3 La surveillante, 4 La
garde meubles, 5 La réglementaire,
6 La cuisinière, 7
L'économe, sans parler de
la mère Supérieure et de ses deux
assistantes. Chacun de ces emplois
a ses règles particulières
qu'on ne leur communique que lorsque
l'obéissance les y a
placées.
LEUR REGLEMENT JOURNALIER
266. 1. Elles se lèvent, en
tout temps, à quatre heures, et,
pendant une demi-heure, elles approprient
leur chambre, leur
lit et leurs habits.
267. 2. A quatre heures et demie,
elles font une heure
d'oraison jusqu'à cinq heures
et demie, et, depuis cinq heures
et demie jusqu'à six, elles
psalmodient, debout, le premier
chapelet du saint Rosaire.
268. 3. Elles vont ensuite à
la Sainte Messe, en silence et
avec modestie, et, au retour de
la Sainte Messe, elles
déjeunent en silence, si
elles veulent déjeuner.
269. 4. Après le déjeuner,
chacune s'applique à l'ouvrage et à
l'exercice qui lui est marqué
par l'obéissance, et elle le
continue jusqu'à onze heure
et demie.
270. 5. A onze heures et un quart,
elles font un quart d'heure
d'examen de conscience, et ensuite
elles dînent, en silence et
avec modestie.
271. 6. Au sortir du repas, elles
font la récréation jusqu'à
une heure.
272. 7. A une heure précise,
elles psalmodient le second
chapelet comme le premier, et ensuite
elles se remettent à
leur ouvrage, jusqu'à cinq
heures et demie.
273. 8. A cinq heures et demie, elles
font une demi-heure
d'oraison, et ensuite elles psalmodient
le troisième chapelet
comme les autres; puis elles vont
souper.
274. 9. Après le souper, elles
se récréent jusqu'à huit
heures; ensuite la prière,
la lecture du sujet d'oraison ou
l'entretien jusqu'à huit
heures et demie, et elles sont
couchées, au plus tard, à
neuf heures.
REGLES DES MAITRESSES D'ECOLE
275. 1. Elles doivent savoir bien
lire, bien écrire et bien
faire le catéchisme; il serait
bon même qu'elles sussent
l'arithmétique.
276. 2. Elles commencent l'école
à huit heures du matin
jusqu'à dix et à deux
heures du soir jusqu'à quatre, tous les
jours hormis le jeudi qui est le
jour de congé, et elles font
entendre tous les jours la Sainte
Messe aux enfants depuis dix
jusqu'à environ dix heures
et demie et elles leur font
psalmodier le chapelet à
quatre heures précises du soir.
277. 3. Si elles demeurent dans la
communauté, elles en
sortent tous les matins un peu devant
huit heures pour se
rendre au lieu de leur école
à huit heures précises, et s'en
reviennent dîner après
qu'elles ont fait entendre la Sainte
Messe à leurs enfants, et
le soir après la psalmodie du
chapelet, c'est-à-dire environ
à une heure et demie après
midi, elles vont à leur école
et en reviennent à quatre heures
et demie après le chapelet
qu'elles ont fait dire aux enfants.
278. 4. Si elles tiennent l'école
en quelque ville ou paroisse
de campagne éloignée
de la communauté, elles font leurs
exercices et leurs règles
dans le lieu où elles sont établies
comme si elles étaient dans
la mère communauté.
279. 5. Quand elles tiennent les
écoles dans les villes ou
paroisses de campagne, elles cessent
l'école le lendemain de
l'assomption de la Sainte Vierge
jusqu'au lendemain de Saint
Matthieu qu'elles les recommencent,
et, pendant ce mois
d'intervalle, elles viennent à
l'appel des Supérieurs à la
mère communauté pour
y rendre compte de leur année et pour y
faire une retraite de dix jours
et reprendre de nouvelles
forces pour mieux travailler.
280. 6. On prend ce temps de congé
dans les campagnes parce
que c'est le temps de la récolte
où les enfants même sont
occupés par leurs parents;
pour le moins pendant un mois elles
auront vacances et selon les lieux
où elles se trouvent.
REGLES DES ECOLES CHARITABLES DES FILLES DE LA SAGESSE
281. 1. Le but des écoles
charitables est l'instruction et la
perfection de la Jeunesse par pure
charité, sans intérêt que
la plus grande gloire de Dieu, le
salut des âmes et sa propre
perfection.
282. 2. Pour atteindre cette fin
si noble il faut absolument
que l'ordre et le silence soient
bien établis en ces écoles,
autrement elles deviendraient une
occasion de péché et aux
enfants et aux maîtresses.
283. 3. Afin que l'ordre de Dieu
y soit gardé il faut régler:
1 Les maîtresses qui doivent
faire les dites écoles, 2 les
enfants qu'on y reçoit, 3
le temps qu'on y passe, 4 le lieu
où on les fait, 5 les exercices
d'étude et de piété qu'on y
pratique, 6 les récompenses
qu'on y donne, 7 les châtiments
qu'on y exerce.
284. 4. Les maîtresses d'école
doivent être du nombre de
celles qui sont capables de ce divin
emploi et qui ont fait
leur profession dans leur communauté.
285. 5. On ne reçoit dans
leurs écoles que les filles pauvres
ou riches jusqu'à vingt ans,
et qui soient sages et
obéissantes. On en exclut:
1 les garçons 2 les femmes
mariées ou veuves 3 les filles
scandaleuses et
désobéissantes, les
petites filles qui n'ont pas encore un
commencement suffisant.
286. 6. Les Soeurs font les dites
écoles par pure charité,
sans demander ni recevoir rien des
enfants par leur mains ni
directement ni indirectement. Si
cependant quelque enfant ou
parent des enfants veut par pure
reconnaissance, sans qu'on
lui ait demandé, leur donner
quelque chose, elles ne le
reçoivent pas, mais le leur
font mettre entre les mains de la
Supérieure des Filles de
la Sagesse, où sont les écoles, pour
être employé à
l'entretien de la communauté.
287. 7. Les enfants viennent en tout
temps après avoir dejeûné
chez eux, à huit heures précises
du matin et ils en sortent à
dix heures précises pour
aller à la Sainte Messe. Ils viennent
à l'école tous les
jours ouvriers, hormis le jeudi qui est
leur jour de congé.
288. 8. Le lieu où l'école
se fait doit être un peu plus long
que large. On doit placer dans le
fond la chaire de la
maîtresse et au-dessus d'elle
contre le mur le catalogue des
enfants. On doit placer 9 bancs
dans la dite école, dont la
longueur soit proportionnée
à ce lieu, et au nombre des
enfants. Quatre d'un côté
et quatre de l'autre et un dans le
fond. On appelle le 1er banc des
Séraphins et on y place les
enfants qui ont fait leur première
communion. Le 2 des
Chérubins et on y place ceux
qui par leur âge et leur modestie
méritent d'être préparés
à la communion. Le 3 des Trônes et
on y met ceux de 13, 14, etc. mais
qui n'ont pas communié et
qui n'ont pas assez de sagesse pour
y être prochainement
préparés. Le 4 des
Dominations et on y place les enfants de
douze ans. Le 5 des Vertus et on
y place les enfants d'onze
ans. Le 6 des Puissances où
sont les enfants de 10 ans. Le 7
des Principautés où
l'on met ceux de neuf ans. Le 8 des
Archanges où sont les enfants
de 8 ans. Le 9 enfin des Anges
où on range les petits de
sept ans.
289. On partage toute l'école
en quatre classes quand il n'y a
pas une seconde école pour
les petits. La 1ère s'appelle la
lecture. La 2 l'assemblage. La 3
l'appellage. La 4 la
A.B.C. Si quelque enfant par exemple
de dix ans ou au-dessous
est assez habile pour être
placé dans la première classe parmi
les Séraphins, les Chérubins
et les Trônes on l'y place
regardant plutôt la science
que l'âge et ainsi du reste.
Quand il y a deux chambres distinguées
pour l'école, on
met dans la 1ère ceux qui
apprennent à écrire et à lire
coulamment et dans la 2 ceux qui
ne font qu'assembler et
appeler, et connaître leurs
lettres.
290. Les enfants apprennent à
lire et à écrire pendant une
heure et demie, le matin, et une
heure et demie, le soir. Les
deux autres heures sont employées
à leur apprendre leurs
prières et leur catéchisme
et à entendre la Sainte Messe, le
matin, et à réciter
le chapelet, le soir. Ce qui fait en tout
cinq heures par jour.
291. Les enfants n'entrent au lieu
de l'école que lorsqu'à
huit heures précises la cloche
les appelle, et ils y entrent
avec modestie en silence et deux
à deux. En entrant ils
prennent de l'eau bénite
disant tout haut "Deo gratias" et
vont se mettre à genoux chacun
en sa place marquée et ils s'y
tiennent en silence les mains jointes
jusqu'à ce que la
maîtresse ait commencé
les prières du matin pendant que les
enfants s'assemblent et, lorsqu'ils
sont assemblés, la Soeur
entonne :
O Saint-Esprit donnez-nous vos lumières
Venez en nous pour nous embraser
tous
Pour nous régler, pour former
nos prières
Nous ne pouvons faire aucun bien
sans vous.
Ensuite elle donne le signal et
tous les enfants se
lèvent, elle donne le 2 et
ils font la révérence à Jésus et
Marie et enfin le 3 et ils s'assoient
les mains jointes.
292. La soeur ensuite commence par
leur faire bien faire le
signe de la croix deux fois, les
fait mettre en la présence de
Dieu et leur fait faire les actes
suivants de la religion.
1. Mon Dieu, je crois fermement
que vous êtes ici
présent, je vous y adore
et je vous y reconnais pour mon
Souverain Seigneur et maître
dont je dépends uniquement.
2. Mon Dieu, je crois tout ce que
croit et enseigne la
Sainte Eglise catholique apostolique
et Romaine parce que
c'est vous qui l'avez dit et qui
ne pouvez mentir.
3. Mon Dieu j'espère votre
secours et mon salut par les
mérites de Jésus-Christ
mon Sauveur.
4. Mon Dieu et mon tout je vous
aime par-dessus toutes
choses, pour l'amour de vous-même,
et mon prochain comme moi-
même pour l'amour de vous.
5. Mon Dieu j'ai regret de tout
mon coeur de vous avoir
offensé parce que vous êtes
infiniment bon et infiniment
aimable et que le péché
vous déplaît. Je fais un ferme propos
moyennant votre sainte grâce
de ne plus jamais vous offenser.
J'aimerais mieux mourir tout à
l'heure que de faire un
péché mortel.
6. Enfant Jésus nous vous
offrons l'école présente,
donnez-y s'il vous plait avec votre
Sainte Mère la
bénédiction.
7. Saints anges gardiens nous vous
saluons et nous vous
prions de nous aider pendant cette
école, chassez-en le démon
afin qu'il ne nous nuise pas.
ELECTION DE LA SUPERIEURE ET DE SES DEUX ASSISTANTES
293. 1. Toute la communauté
après avoir fait une neuvaine de
communions et avoir jeûné
trois jours pour demander le Saint-
Esprit procède à l'élection
d'une supérieure dans la manière
suivante. Voici ses qualités.
294. 2. Celle sur qui on doit jeter
les yeux doit être de
toute la communauté la plus
sage, la plus prudente, la plus
pauvre d'esprit, la plus détachée
du monde et de ses parents,
la plus morte à sa volonté
propre, la plus exacte au silence
et aux autres règles, la
plus amie de la retraite, la plus
désireuse de la Sainte Communion,
la plus avancée dans
l'oraison et la mortification, la
plus charitable et tout
ensemble la plus ferme, enfin elle
doit être avant son
élection le plus grand exemple
des vertus et non pas la plus
riche ou la plus noble.
295. 3. On propose les trois Soeurs
qui ont entre les autres
ces vertus et ces belles qualités
avec plus davantage. Et le
"Veni Creator" étant chanté
le samedi veille de la Pentecôte
le matin, elles vont les unes après
les autres donner en
secret leurs suffrages à
celle des trois qui leur paraîtra la
plus digne de tenir la place de
Dieu, ce qui se fait en
mettant un petit pois dans la boite
sur laquelle est écrit le
nom de celle qui leur paraît
la plus digne.
296. 4. Celle qui a le plus de voix
est élue Supérieure, celle
qui après elle en a le plus
est choisie 1ère Assistante et
celle qui en a le moins est la 2
Assistante.
297. 5. Celle qui a été
élue Supérieure demeure trente et
trois jours sans exercer les fonctions
de supérieure pour se
rendre encore plus enfant et obéissante
qu'elle n'a jamais
été. C'est pourquoi
elle se fait la dernière de toutes, elle
fait les choses les plus basses
de la communauté comme servir
à table, balayer, baiser
les pieds des autres, etc. C'est ce
qu'elle fait avec joie et obéissance
à l'ancienne Supérieure.
Voici comme elle prend en main le
gouvernement de la
communauté.
298. 6. Etant assemblées en
Chapitre l'ancienne Supérieure la
fait venir à genoux devant
elle et en présence des autres qui
sont assises elle lui demande en
premier lieu: "Que voulez-
vous faire ma chère soeur
en cette communauté?" Elle lui
répond ce seul mot: "Obéir".
En 2 lieu lui dema nde: "Quelle
place voulez-vous y tenir?" Elle
répond: "La dernière".
Alors l'ancienne lui dit qu'elle
doit obéir à Dieu seul.
Le Saint-Esprit qui l'ayant choisie
pour Supérieure veut
qu'elle commande aux autres et qu'elle
tient sa place dans la
communauté. Ensuite l'ancienne
Supérieure se met à genoux
devant toutes ses Soeurs, leur demande
pardon des fautes
qu'elle a faites et du mauvais exemple
qu'elle leur a donné.
Puis la nouvelle Supérieure
ayant fait le signe de la
croix en disant tout haut: "Adjutorium
nostrum in nomine
Domini", elle se met en la place
de la Supérieure. Aussitôt
l'ancienne Supérieure se
jette à genoux devant elle et lui
dit: "Je crois fermement que vous
tenez la place de Dieu parmi
nous c'est pourquoi je me soumets
à tous vos commandements
pour l'amour de Dieu et j'espère
avec l'aide de sa grâce m'y
rendre fidèle". Toutes les
Soeurs à genoux répondent "Ainsi
soit-il". Et puis elles viennent
les unes après les autres lui
baiser les pieds, après lequel
acte d'humilité, la nouvelle
Supérieure commence ses fonctions
par un acte de charité en
les embrassant les unes après
les autres, avec une grande
affection. Après quoi on
chante le "Te Deum" et le
"Magnificat".
299. 7. La Supérieure Générale
peut être perpétuelle.
Cependant tous les 3 ans elle est
confirmée dans une assemblée
générale et si elle
était convaincue par la plus grande partie
de la communauté de ne pas
faire son devoir on procéderait à
l'élection d'une autre.
300. 8. La première assistante,
en l'absence de la Mère, tient
sa place et la deuxième assistante
la place de la première.
Voici la conduite de la Supérieure.
REGLES PARTICULIERES DE PRUDENCE
ET DE CHARITE
QUE LA SUPERIEURE DOIT GARDER
301. 1. Elle doit être plus
que jamais l'exemple de toutes
sortes de vertus et particulièrement
de l'humilité et du
recueillement qui sont les deux
vertus les plus difficiles à
conserver dans la supériorité
et auxquelles pourtant le Saint-
Esprit excite les supérieurs.
C'est pourquoi elle méditera
tous les jours ces deux avertissements
de la Sagesse: 1.
"humiliez-vous d'autant plus en
toutes choses que vous êtes
plus relevée et si on vous
a mise supérieure dans une maison
soyez en humiliée comme une
de vos inférieures". 2. "Marthe,
Marthe, vous vous embarrassez et
vous troublez beaucoup à
l'égard de plusieurs choses,
il n'y a qu'une chose
nécessaire".
302. 2. Elle ne fait jamais rien
de nouveau et de conséquence
sans prendre l'avis du père
spirituel et de ses deux
assistantes. Si elle est d'un avis
contraire au leur, après
avoir simplement représenté
ses raisons pour faire le
contraire, elle se détermine
à suivre leur sentiment. En
agissant ainsi, elle agira sagement
et prudemment parce
qu'elle agira humblement, parce
que Dieu donne sa grâce aux
humbles qui malgré leurs
lumières, pour l'amour de la paix et
de l'obéissance soumettent
leur jugement et, quand même ce
qu'elle voulait serait le plus juste,
Dieu tirera sa gloire et
sa victoire de sa soumission. Cependant
elle écoute de telle
sorte ses deux assistantes qu'elle
ne se détermine à suivre
leur sentiment qu'en leur absence
et après avoir fait oraison.
303. 3. Elle se fait plus aimer que
craindre, c'est pourquoi
elle gouverne en toutes choses avec
la verge d'or de la
charité et non pas avec la
verge de fer de la crainte. La
charité d'un supérieur
élargit merveilleusement le coeur d'un
inférieur, l'anime et le
fortifie à mieux faire. Au contraire
l'esprit de crainte qu'un Supérieur
inspire par ses manières
dures, rebutantes, sévères
et élevées rétrécit le coeur de
l'inférieur, le rend faible,
craintif, pusillanime et abattu.
304. 4. A la vérité
elle a l'oeil à tout autant qu'elle peut,
mais elle ne le fait pas quasi paraître,
elle ne fait voir à
toutes ses soeurs qu'un grand désir
de leur faire plaisir, et
une grand persuasion qu'elle les
voit déterminées à tout bien.
Elle évite donc ces manières
de gouvernement de plusieurs
Supérieurs qui dans le désir
trop ardent qu'ils ont de faire
observer les règles sont
partout pour sonder et pour examiner
chaque particulier, qui soupçonnent
de tout, qui interprètent
mal les moindres fautes, qui reprennent
sévèrement et
imprudemment les défaillants
en des temps où ils sont
incapables de recevoir avec fruit
la médecine amère de la
correction et qui leur imposent
des pénitences involontaires
qui les rebutent, et cette conduite
et cette manière de
gouverner n'est bonne qu'à
l'égard des esprits bas et serviles
qui se conduisent par la crainte
et par la force, mais non pas
du tout à l'égard
de ceux qui se lient volontairement et se
conduisent par amour.
305. 5. Cette conduite charitable
ne doit pas l'empêcher
d'être ferme et juste en reprenant
et en corrigeant les
défaillants. Mais elle sait
distinguer les fautes de faiblesse
et d'ignorance d'avec celles qui
sont de malice et
d'opiniâtreté. Elle
pardonne aisément les premières et
quelques fois elle ne fait pas semblant
de les voir, mais elle
reprend et elle corrige sans rémission
les secondes, mêlant
toujours beaucoup de douceur dans
sa fermeté et faisant
paraître que c'est malgré
elle qu'elle en vient à la
correction, pour le bien de toute
la communauté. Si elle ne
disait mot, ou fort faiblement,
à une de ses soeurs qui, de
propos délibéré
sans se vouloir contraindre, tomberait dans
une faute publique contre la règle
p.e. romprait le silence ou
l'obéissance, elle tomberait
dans une connivence ou
condescendance condamnable et elle
répondrait à Dieu de la
transgression des règles
et du relâchement que cette conduite
introduirait.
306. 6. Quand quelqu'une de ses soeurs
fait une faute publique
qui paraît devant les autres,
si elle croit que cette soeur
aura assez de vertu pour souffrir
une réprimande publique,
elle la lui fera, mais si la défaillante
transportée par la
passion n'est pas en état
de profiter de la réprimande, la
Supérieure priera la communauté
devant qui la faute se fait,
de n'être pas scandalisée
et qu'elle y mettra ordre, et puis
quelque temps après, elle
lui fera la correction en
particulier et lui ordonne une pénitence
publique pour réparer
sa faute publique.
307. 7. Elle ne reprend jamais publiquement
des fautes
commises en secret et qui n'ont
scandalisé personne.
308. 8. Elle se donne bien de garde
de tutoyer ses
inférieures, de leur dire
des paroles injurieuses, de leur
faire publiquement des reproches
même justes de leurs
communions, de disputer et criailler
contre elles. Mais elle
leur parle en public et en particulier
avec toute sorte
d'humilité et de charité.
Et quand elle a un juste sujet de
les reprendre fortement elle le
fait toujours avec honnêteté.
Quand une de ses inférieures
dispute, elle lui cède dans le
moment et par après lui fait
connaître et payer sa faute.
309. 9. Quand une soeur ou un pauvre
de l'hôpital ou un enfant
de l'école se vient plaindre
à elle de quelque Supérieure
subalterne, elle l'écoute
avec paix et charité mais elle ne
l'approuve pas de telle sorte qu'elle
condamne la conduite de
cette Supérieure. Au contraire
elle tâche d'approuver devant
celui ou celle qui se plaint, quoique
effectivement cette
soeur ait tort, réservant
à parler en particulier à cette
soeur pour découvrir la vérité
de la faute et y mettre ordre.
310. 10. Elle prend bien garde d'ajouter
foi tout d'abord au
mal qu'on lui rapporte des inférieurs
pour y mettre ordre mais
elle suspend son jugement et ne
condamne point ouvertement la
personne accusée jusqu'à
ce qu'elle ne soit pleinement
informée de la vérité.
Elle garde un grand secret des choses
qui se passent dans
la communauté et elle le
fait garder exactement à toutes les
Soeurs, corrigeant sévèrement
celle qui babillent et qui ne
retiennent point leurs langues.
311. 11. Voici ce que dit saint François
de Sales, et ce
qu'elle doit observer: comme l'âme
et le coeur répandent leur
assistance, mouvement et action
en toutes les parties du
corps, ainsi la Supérieure
doit animer de sa charité, de son
soin et de son exemple toute la
congrégation, vivifiant par
son zèle toutes les soeurs
qui sont en sa charge, procurant
que les règles soient observées
le plus exactement qu'il se
pourra et que la mutuelle charité
et sainte amitié fleurisse
en la maison; et pour cela elle
ouvrira sa poitrine maternelle
et aimable à toutes les filles
également, afin qu'en toute
confiance elles aient recours à
elle en leurs doutes,
difficultés, scrupules, troubles
et tentations.
312. Qu'elle observe elle-même
de tout son pouvoir les règles
et constitutions sans qu'elle pratique
aucune singularité ni
prenne, ni reçoive aucun
avantage en habits, viandes et autres
choses, sinon comme les autres à
mesure que la nécessité le
requerra.
313. Elle commandera à chacune
de ses soeurs et à toutes en
général avec des paroles
et contenances graves, mais suaves;
avec un visage et maintien assuré
mais doux et humble, et avec
un coeur plein d'amour et de désir
du profit de celle à qui
elle commande.
314. Elle tiendra les yeux attentifs
sur ce petit corps de
congrégation afin que toutes
les parties d'iceluy respirent la
paix, la concorde, l'union et le
service très aimable de
Jésus-Christ et partant,
lorsqu'une fois les mois les Soeurs
lui rendent compte de leurs âmes,
elle les examinera,
s'enquérant discrètement
de l'état présent de leur esprit pour
par après les aider, exciter,
corriger et soulager.
315. Elle pouvoira avec un soin particulier
à la nécessité des
malades. Elles les servira fort
souvent de ses propres mains
ès maladies de conséquence.
316. Elle élèvera avec
un coeur paternel les Soeurs qui comme
petits enfants seront encore faibles
en la dévotion, se
ressouvenant de ce que dit saint
Bernard à ceux qui servent
les âmes:
La charge des âmes, dit-il,
n'est pas des âmes fortes
mais des infirmes: Car si quelqu'un
te secourt plus qu'il
n'est secouru de toi, reconnais
que tu es non pas son père,
mais, son pair. Les justes et parfaits
n'ont pas besoin de
supérieur et de conducteur,
ils sont eux-mêmes leur loi et
leur direction par la grâce
de Dieu et font assez sans qu'on
leur commande.
La Supérieure doit être
particulièrement pour les
imbéciles et débiles,
bien qu'aussi elle ne doit pas
abandonner les parfaites afin qu'elles
persévèrent sans se
relâcher. Et partant, qu'elle
prenne garde aux nécessités des
Soeurs selon la sincérité
de la dilection chrétienne et non
selon les inclinations naturelles,
et sans avoir égard à
l'extraction ou origine des filles,
à la gentillesse de leurs
esprits, bonnes mines, et autres
telles conditions attrayantes
et qu'elle ne familiarise pas en
telle manière avec les unes
que cela puisse servir de tentation
d'envie aux autres.
317. Elle ne reprendra point les
fautes qui se commettent sur
le champ devant les autres, ains
en particulier avec charité,
sinon que la faute fut telle que
pour l'édification de celles
qui l'auraient vue faire elle requiert
un prompt resentiment,
lequel en ce cas là elle
fera de telle sorte que blâmant le
défaut elle soulage la défaillante,
tâchant d'être vraiement
redoutée mais pourtant beaucoup
plus aimée.
318. Qu'elle ne concède point
aisément à pas une l'usage des
sacrements plus fréquent
que celui qui est porté par les
constitutions de peur qu'au lieu
d'une amoureuse et
respectueuse communion, il ne s'en
fasse plusieurs par
imitation, jalousie, propre estime
et vanité.
319. Elle se choisira une bonne amie
parmi ses soeurs qui
l'avertisse charitablement de ses
défauts et à laquelle les
autres soeurs puissent facilement
s'adresser pour lui dire
leurs plaintes qu'elles n'oseraient
pas lui faire directement
à cause du respect et elle
l'écoutera joyeusement lorsqu'elle
en sera avertie en particulier.
320. 12. Elle a le pouvoir de dispenser
de l'observance des
règles en des cas particuliers
selon que la prudence et la
charité et la nécessité
le requièrent soit à cause de la
maladie soit à cause des
emplois, mais elle n'en dispense
jamais aucune soeur pour toujours
eu égard à la seule qualité
de la personne.